Une attaque inédite pour un officier de ce rang : le général Mark Milley, en quittant vendredi son poste de chef d’état-major des forces armées américaines, s’en est pris à l’ancien président Donald Trump, en disant qu’aucun militaire n’était au service d’un « dictateur en puissance ».
« Nous ne prêtons pas serment de servir un roi, ou une reine, ou un tyran, ou un dictateur. Et nous ne prêtons pas serment de servir un dictateur en puissance. (…) Nous prêtons serment de défendre la Constitution », a dit le militaire, en grande tenue, lors de la cérémonie marquant son départ à la retraite après un mandat émaillé de crises.
La référence est transparente. Selon un livre récent du journaliste d’investigation Bob Woodward, à la fin de l’ère Trump, le général Milley avait contacté à plusieurs reprises son homologue chinois pour le rassurer sur la position américaine, sans en avertir le président républicain, dont il s’inquiétait.
Exécuté
Le chef d’état-major s’est attiré les foudres de Donald Trump qui a récemment laissé entendre que Mark Milley s’était rendu coupable de « trahison » et qu’en d’autres temps il aurait été exécuté.
Le président américain Joe Biden, lors de la cérémonie vendredi, a pour sa part salué un « patriote, intransigeant dans l’accomplissement du devoir, inébranlable face au danger et d’un dévouement indéfectible à son pays ».
Son « aide a été inestimable », a dit le démocrate de 80 ans, en affirmant que le général avait toujours « été guidé par la Constitution ».
Charles « C.Q. » Brown, actuellement à la tête de l’armée de l’air, va lui succéder. Après Colin Powell dans les années 1990, il sera le second Afro-Américain à occuper le poste de plus haut gradé de l’armée considérée la plus puissante du monde.
« C’était une crise après l’autre », sans interruption, confiait récemment Mark Milley à l’AFP à propos de son mandat qui avait commencé en octobre 2019.
Kaboul et Kiev
Aux côtés du ministre Lloyd Austin, l’actuel chef d’état-major a notamment piloté l’aide militaire américaine à l’Ukraine face à l’invasion russe.
Son passage a aussi été marqué par la débâcle américaine à Kaboul, quand, en août 2021, les talibans ont repris le contrôle de l’Afghanistan à l’issue d’une guerre de vingt ans qualifiée par Mark Milley lui-même d’ »échec stratégique ».
Le général Milley avait aussi exprimé son regret d’avoir été présent aux côtés de Donald Trump quand le président avait fait disperser une manifestation du mouvement « Black Lives Matter » devant la Maison Blanche pour aller se faire prendre en photo devant une église, bible à la main.
Son successeur, Charles Q. Brown, est un ancien pilote expérimenté avec 3.000 heures de vol au compteur, dont 130 de combat.
Chef de brigade, il a ensuite été commandant des forces aériennes américaines au Moyen-Orient et dans le Pacifique.
Ce général avait été remarqué à l’été 2020, justement en pleines manifestations « Black Lives Matter » contre le racisme, dans la foulée de la mort de George Floyd, tué par un policier blanc à Minneapolis (Minnesota).
Le haut gradé avait publié une vidéo dans laquelle il faisait état des discriminations qu’il avait lui-même subies, y compris dans l’armée.
La confirmation par le Sénat du général Brown a été longtemps retardée en raison du blocage délibéré d’un sénateur conservateur pour manifester son opposition à la décision du Pentagone d’aider les femmes militaires à obtenir un avortement. C.Q. Brown a finalement été confirmé par un vote contournant ce blocage.
De nombreuses autres nominations restent toutefois bloquées et Joe Biden a jugé « complètement inacceptable que plus de 300 autres militaires hautement qualifiés soient ainsi maintenus dans l’incertitude ».