Stromae, en concert mercredi soir à Dakar, s’est imposé aux générations de mélomanes contemporains, tous âges confondus, en misant sur le génie de la musique pour rappeler aux hommes le poids de leurs cauchemars et leurs rêves de bonheur et d’accomplissement.
L’artiste belge est un auteur, compositeur et interprète qui a su véritablement emprunter tous les langages de l’humanité à travers ses deux premiers albums. Des condensés de plusieurs genres musicaux, allant de la house music à celle traditionnelle et symbolique par moments comme un retour aux sources africaines.
Stromae, « un phénomène » de la musique d’expression française selon la plupart des critiques, avait fait son entrée dans la musique par le rap vers 2000 sous le pseudonyme Opsmaestro.
Comparé à Jacques Brel (auteur belge disparu en 1978), l’artiste de 30 ans, s’est réellement fait connaitre à travers son single « Alors on danse », un titre d’introduction à la sortie en juin 2010 de son premier album « Cheese ».
Première chanson de l’artiste à être diffusé en tant que clip, elle raconte l’histoire d’un employé de bureau qui stress et qui cherche à se détendre. Sur une musique électro comme la majeure partie des titres de son premier opus dont « Te Quiero » ou encore « House’llelujah », cette première chanson contribue à le propulser dans de nombreux pays européens.
Interrogé mardi en conférence de presse sur les messages qu’il pourrait délivrer à travers sa musique, l’auteur explique: »Je raconte l’humanité c’est tout ce que je fais, rien de plus, rien de moins, en racontant une tranche de vie, je raconte l’humanité ».
De son vrai Paul Van Haver, patronyme de sa mère belge – son père est Rwandais – Stromae (maestro en verlan) a vendu ce single à plus de 3 millions d’exemplaires, un succès tel que le fameux rappeur américain Kanye West décide d’en faire un remix en collaboration avec l’auteur la même année.
Stromae sort « Racine Carrée » trois ans plus tard, un album qui a fait connaitre le chanteur belge au-delà des frontières européennes, particulièrement en Afrique.
La vidéo en caméra cachée pour son titre « Formidable » est probablement celui qui l’a révélé aux Etats-Unis. Après avoir eu droit à un portrait dans le New York Times, il pose en couverture du célèbre magazine américain Time Out, déguisé mi-homme, mi-femme, comme dans son autre vidéo « Tous les mêmes ».
La »Stromania » va ainsi déferler de l’autre côté du continent, précisément en Afrique notamment à travers son tube « Papaoutai ». Soit l’une des vidéos d’un artiste francophone la plus regardée sur la plateforme Youtube avec à ce jour plus de 254 millions de vues en seulement un an.
Papaoutai (Papa ou t’es), pour sa part, est une mélodie électronique très dansante, qui cache en réalité des paroles mélancoliques retraçant son vécu avec un père qu’il n’a jamais connu et qui fut assassiné lors du génocide rwandais en 1994. Stromae n’avait alors que 9 ans.
Il s’agit donc d’un deuxième album que beaucoup considère comme un retour aux sources avec un mélange de styles afro, en passant par les sonorités cubaines jusqu’à la rumba congolaise. Il y a aussi dans cette production ce soupçon d’hommage à la chanteuse capverdienne Cesaria Evora, qui reflète selon lui »le visage de la mélancolie ».
L’album révèle ainsi un oxymore parfait entre musique et parole donnant un aspect original à ses chansons qui épousent toutes les sonorités du monde.
L’artiste métisse parle aussi beaucoup de »mélancolie », un sentiment qui selon lui caractérise »une belle définition de la vie », pour celui qui se décrit comme une personne qui a peur de l’inconnu.
« J’ai peur de l’inconnu, étant donné que je suis assez rigide et calculateur, forcément, dès que je suis face à l’inconnu, je perds un peu de mes moyens », a-t-il expliqué aux journalistes.
Avec ses 1m 90, ce métis aux yeux verts apparaît dans les plateaux télévisés et conférences de presse, sous les airs d’un jeune homme timide. Son sourire et son calme apporte une pudique douceur à son personnage.
Mais sur scène, Stromae s’impose comme un artiste complet, chanteur doublé d’un danseur adoré des petits et des grands qu’il régale par ses chorégraphies déconcertantes par leur originalité.
C’est que l’artiste belge réussit toujours le tour de force de traduire d’une manière excellente l’image de ses paroles en danses fort à propos, non sans aborder des thèmes aussi sérieux que le cancer (quand c’est ?), le racisme (Bâtard) ou encore ce qu’il appelle »la fausse spontanéité » dans les réseaux sociaux (Carmen).
Kigali, la capitale du Rwanda, sera, le 20 juin prochain, la dernière étape d’une tournée africaine qui aura conduit le musicien belge à Dakar (ce mercredi), Praia, au Cap-Vert (16 mai), Douala, au Cameroun (19 mai), Abidjan, en Côte d’Ivoire (23 mai), Libreville, au Gabon (6 juin), Brazzaville, au Congo (10 juin), Kinshasa, en RD Congo (13 juin) et Kigali, au Rwanda (20 juin).
Source : Aps