Une brebis génétiquement modifiée s’est retrouvée illégalement dans la chaîne alimentaire fin 2014, en raison d’un dysfonctionnement au sein de l’Institut national de recherche agronomique (Inra), qui assure toutefois qu’il n’y a pas de « risque » pour le consommateur.
« La consommation de cette viande ne présente aucun risque pour la santé du consommateur », a insisté mardi Benoît Malpaux, le président du centre de l’Inra à Jouy-en-Josas (Yvelines).
L’affaire a été révélée mardi par le quotidien Le Parisien alors que les OGM continuent de susciter une profonde méfiance en France.
Dans le collimateur, l’agnelle Rubis, génétiquement modifiée. Les chercheurs de l’Inra avaient introduit une protéine de méduse dans le génome de sa mère, dans le cadre d’un programme de recherche en cardiologie humaine.
Cette protéine, « couramment utilisée dans des protocoles de recherche » selon l’Inra, donne à la peau des reflets vert fluorescent lorsqu’elle est éclairée avec un certain type de lumière. Les scientifiques l’utilisent pour évaluer la viabilité de greffes.
La jeune femelle était porteuse du gène modifié, mais « n’exprimait pas » la protéine, c’est-à-dire que sa peau n’était pas fluorescente.
Même si la viande de Rubis a pu être consommée, la protéine « ne présente aucune toxicité », affirme l’Inra. L’agnelle appartenait aux OGM du groupe 1, « dont le risque pour la santé humaine et pour l’environnement est nul ou négligeable ».
Pour l’Agence nationale de la sécurité sanitaire (Anses), le risque est « quasiment inexistant », d’autant qu’il s’agit d’un « événement ponctuel ayant conduit à une exposition unique ».
Si la jeune brebis s’est retrouvée dans le commerce, c’est qu’elle a été mise volontairement dans un enclos où elle n’aurait jamais dû se trouver, sur le site d’expérimentation de Bressonvilliers dans l’Essonne, affirme l’Inra, 2e organisme de recherche agronomique au monde.
En son sein, certains laboratoires ont en effet leurs propres élevages.
Les animaux qui ne sont pas utilisés pour les expériences (par exemple les mâles si l’expérimentation est axée sur les femelles) sont élevés comme des animaux classiques, puis revendus à des abattoirs qui les commercialisent normalement. Le produit des ventes finance la recherche.
Les autres bêtes sont envoyées à l’équarrissage, après être passées entre les mains des scientifiques. Si elles contiennent des produits toxiques ou ont été génétiquement modifiés, elles sont détruites « par incinération », selon M. Malpaux.
L’agnelle Rubis aurait dû se trouver dans cette dernière catégorie. Mais en août 2014, elle a été amenée avec des animaux normaux à un abattoir francilien, avant d’être vendue à un particulier non identifié à l’automne.
– « Actes inadmissibles » –
Les faits ont été volontairement « dissimulés pendant trois mois par les personnes qui étaient directement concernées par l’entretien des animaux », notamment un technicien animalier et le responsable des activités expérimentales sur les bovins, ovins, caprins, selon M. Malpaux.
« Nous avons la certitude que des actes individuels inadmissibles ont été commis », affirme M. Malpaux, pointant « une succession d’erreurs et de responsabilités dans toute la chaîne hiérarchique ».
« L’ambiance qui régnait au sein de cette équipe peut être à l’origine de ces comportements », estime le dirigeant.
L’Inra vient de signaler cette infraction au code de l’environnement au parquet de Meaux, qui a transmis l’affaire au pôle de santé publique du Tribunal de grande instance de Paris, selon une source judiciaire.
Des sanctions pourraient être prises après un conseil disciplinaire prévu début juillet au sein de l’institut, qui a suspendu « en urgence » la vente de toute viande venant du site concerné et arrêté l’expérimentation OGM.
Le ministre de l’Agriculture Stéphane Le Foll a demandé à l’Inra de lui proposer un plan d’action d’ici au 30 juin « pour éviter que cela ne se reproduise », a-t-il annoncé sur France Info.
L’institut prévoit de « renforcer les contrôles », afin de permettre « une identification beaucoup plus explicite des animaux qui font l’objet de manipulation génétique ».
« Aucun animal génétiquement modifié ne bénéficie d?une autorisation de mise sur le marché, où que ce soit dans le monde », rappelle l’Anses.
Source : Presse