Les Etats-Unis ont espionné, au moins entre 2006 et 2012, les trois derniers présidents français. Quelle sera la réaction officielle de l’Elysée, ce mercredi, après la publication de nouveaux documents par WikiLeaks?
Attention, la France va réagir! Elle semble y être bien obligée, après la nouvelle salve de révélations de WikiLeaks sur l’espionnage par les Etats-Unis des trois derniers présidents français, de 2006 à 2012. Les autorités françaises étaient pourtant restées assez mesurées en octobre 2013, alors que Paris était tout autant ciblé que Berlin, lors de la première vague de révélations concernant les écoutes de la NSA en Europe. Le ton se durcira-t-il ce mercredi matin?
François Hollande réunit un Conseil de défense à partir de 9h à l’Elysée. Cette réunion doit servir à « évaluer la nature » de ces informations et « en tirer les conclusions utiles ». Il réunira ensuite une délégation de parlementaires à 12h15 « pour faire le point ». Contacté mardi soir par l’AFP, l’entourage de François Hollande n’a pas souhaité réagir à chaud. « On va regarder de quoi il s’agit », a-t-on déclaré à l’Elysée.
Le communiqué qui suivra sans doute fera-t-il plus que « prendre acte » de cet accroc à la confiance franco-américaine? Le président français s’était fendu d’un appel téléphonique à Barack Obama en octobre 2013 pour demander des « explications ». On apprenait alors que l’ambassade de France à Washington et la représentation française à l’ONU à New York avaient été mises sur écoute par les services de renseignement américains… Le président français avait fait part de sa « profonde réprobation » contre des « pratiques inacceptables » à son homologue américain.
Convoquer l’ambassadrice?
Cette fois, pour envoyer un signal supplémentaire, le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius convoquera-t-il l’ambassadrice américaine Jane D. Hartley? Guido Westerwelle, le chef de la diplomatie allemande, avait choisi cette démonstration symbolique en convoquant l’ambassadeur américain en Allemagne. Laurent Fabius pourrait par exemple évoquer la désormais fameuse « bâche » qui masque une station d’écoute sur le toit de l’ambassade américaine, située à quelques encablures de l’Elysée et de certains des principaux ministères français.
Le dernier étage de l'ambassade américaine est en fait une station d'écoute recouverte d'une bâche en trompe l’œil pic.twitter.com/9bu8xZBslR
— Libération (@libe) 23 Juin 2015
L’opposition a une petite idée du sort à réserver à l’ambassadrice… et au bâtiment situé tout près de l’Elysée.
Si la France se respectait elle ferait détruire la partie de l'ambassade des États Unis ou à lieu les écoutes #WikiLeaks
— Yves Pozzo di Borgo (@YvesPDB) 24 Juin 2015
Plus sérieusement, pourrait-il y avoir des conséquences de ces révélations sur la position française sur le traité de libre-échange entre l’Europe et les États-Unis (Tafta)? Certains le demandent déjà à François Hollande, du côté des Verts ou de la gauche de la gauche.
#NSA citoyens, dirigeants entreprises espionnés, je demande au pdt Hollande de stopper les négociations du traité transatlantique #tafta
— Yannick Jadot (@yjadot) 24 Juin 2015
Espionnage de la France : arrêtons les négociations #TTIP/#TAFTA avec les USA ! ➡️http://t.co/CaLiBpcq4V – #WikiLeaksElysee #Wikileaks #NSA
— Jean-Luc Mélenchon (@JLMelenchon) 24 Juin 2015
François Hollande tiendra-t-il le même langage que la chancelière allemande à l’époque, alors qu’elle soupçonnait la NSA d’avoir placé son propre téléphone portable sur écoute?
Aussi ferme que Merkel en 2013?
« Si de telles pratiques étaient confirmées, elle les considèrerait comme totalement inacceptables », avait réagi Angela Merkel dans un communiqué. « Entre des amis proches et des pays partenaires (…), une telle surveillance d’un chef de gouvernement ne saurait exister. Ce serait un coup sérieux porté à la confiance. (…) de telles pratiques devraient cesser immédiatement ». Une fermeté proportionnelle au choc ressenti en Allemagne après les révélations de l’ancien consultant de la NSA, Edward Snowden.
Ce mardi soir, Nicolas Sarkozy, l’un des trois présidents successifs écoutés par les Etats-Unis, semble déjà utiliser la même tonalité. Interrogé par l’AFP, l’entourage du président du parti Les Républicains a jugé qu’il s’agissait de « méthodes inacceptables en règle générale et plus particulièrement entre alliés ». Pas de réaction du côté des proches de Jacques Chirac, concerné aussi par les oreilles indiscrètes de la NSA à l’Elysée. Celle de François Hollande sera décortiquée, alors que la Maison-Blanche nie en bloc.