PROGRAMME. Cinq organisations professionnelles du ciment, des carrières, des granulats et du béton prêt à l’emploi se rapprochent pour fonder la « Filière Béton », une alliance destinée à porter des propositions concrètes pour les futures échéances électorales, présidentielle en tête. Tour d’horizon de ces idées avec Raoul de Parisot (président du SFIC et de la Filière Béton) et ses vice-présidents, Alain Plantier (SNBPE) et Philippe Gruat (FIB).
« En 2012, la filière avait rencontré plusieurs candidats à l’élection présidentielle en ordre dispersé« , déclare Raoul de Parisot, président de la toute nouvelle « Filière Béton », association qui doit porter le message des industriels auprès des donneurs d’ordres et maîtres d’ouvrages. Pour ne pas répéter cette bévue, l’ensemble des acteurs se sont concertés en amont pour faire naître cette nouvelle entité. « Une même voix pour différents syndicats et organisations professionnelles« , comme le résume Raoul de Parisot qui égrène les cinq membres fondateurs : SFIC (industrie cimentière), FIB (industrie du béton), Unicem (industrie de carrière), UNPG (granulats) et SNBPE (béton prêt à l’emploi). « Une alliance pour que la filière béton fasse des propositions concrètes pour la présidentielle et les futures élections, législatives puis sénatoriales« , poursuit-il.
Le béton contre l’étalement urbain…
Ces idées, que la Filière Béton souhaite voir adoptées par les candidats puis le vainqueur de l’élection, ont été formulées « pour répondre aux besoins des Français« . « Ces besoins quels sont-ils ? Se loger, évidemment, avec un toit au-dessus de la tête qui soit durable et confortable. Avoir un emploi, ce qui conditionne tout le reste, y compris d’avoir un logement. Et enfin, respecter l’environnement au maximum« , énumère Raoul de Parisot. Le premier enjeu est donc celui de la construction de 500.000 logements par an, qu’il s’agisse d’appartements ou de maisons. Le béton annonce vouloir « lutter contre l’étalement urbain et préserver les espaces naturels« . Car la population des villes a fortement augmenté au cours des 30 dernières années (+23 %) et ce mouvement n’est pas près de se ralentir avec une croissance qui se concentre aux trois-quarts dans les 15 premières métropoles du pays. La filière soumet donc l’idée d’une « densification intelligente » par le biais de politiques urbaines adaptées. Alain Plantier, vice-président de la Filière Béton et président du SNBPE, précise : « Il faut aller plus loin, en incitant les autorités à libérer des réserves foncières supplémentaires tout en limitant la hausse du coût des terrains. Ensuite, il faut analyser les réserves des grandes entreprises publiques et évaluer les réserves foncières souterraines pour les réseaux et transports« . Les industriels préconisent également de mieux anticiper l’évolutivité des ouvrages, afin qu’ils deviennent modulables et réversibles quant à leurs usages (de tertiaire vers l’hôtellerie ou vers le logement, par exemple).
… et contre les IGH bois
Une tendance que suivent certains donneurs d’ordres qui souhaitent rendre les bâtiments agiles, comme le rappelle Pierre Laplante, le directeur général du groupe Rector Lesage, un spécialiste des éléments préfabriqués en béton : « C’est une vraie préoccupation des architectes. L’immeuble de bureaux de la Cartoucherie, à Toulouse, intégrait déjà des notions de transformation en logements dès sa conception. Cette agilité d’aménagement est possible grâce au faible nombre de refends rigides et de retombées de poutres« . Alain Plantier (SNBPE) poursuit : « Il faut favoriser le développement de la nature en ville et donc créer des ouvrages qui permettront de gérer cette transition verte. Or, le béton permet d’associer surélévation et végétalisation grâce à la gestion efficace des eaux de pluie et à sa capacité à supporter des charges« . La Filière Béton plaide donc pour la mise en place de dispositifs d’incitation financière, directe ou indirecte. Elle s’inquiète également de la sécurité des biens et des personnes, en ciblant directement la construction bois de grande hauteur. Le vice-président assène : « Les protocoles au feu sont calculés pour le béton, l’acier ou la brique. Mais pas pour le bois ! La stabilité des ouvrages est donc surestimée tandis que la vitesse de propagation de l’incendie est sous-estimée. De nouveaux outils sont donc nécessaires et le principe de précaution s’impose. Nous demandons donc un moratoire sur ces IGH bois, en attendant que la réglementation soit établie« . La Filière Béton s’inquiète qu’un trop grand avantage soit accordé aux biomatériaux, à l’avenir, et que la réglementation entrave l’utilisation du béton. Sur l’impact CO2, que les industriels affirment souhaiter réduire, ils opposent d’autres avantages à leur matériau : « Il faut aussi prendre en compte l’inertie thermique qu’il apporte, ou le confort acoustique, la sécurité sismique, les émissions de COV ou la durée de vie longue supérieure aux 50 ans communément admis« .
Pour le soutien à la ruralité…
L’alliance des industriels du béton prône également l’introduction, dans la commande publique, d’un critère d’économie circulaire en boucle courte, puisque ses installations sont bien implantées sur tout le territoire national. Elle souhaite qu’une expérimentation soit lancée pour améliorer, à la fois la recyclabilité et l’emploi local. Il serait par exemple possible, pour les centrales à béton de venir s’implanter directement sur le site des carrières, ou d’instaurer un principe de reprise des déchets et gravats en double fret, afin de donner une nouvelle vie à des matériaux. « Il faut favoriser la complémentarité rural-urbain« , déclare Philippe Gruat (FIB), autre vice-président de la Filière Béton. Il évoque l’élaboration d’un plan de soutien à la modernisation, l’adaptation et le renouvellement des infrastructures agricoles, en visant en particulier le développement de la filière biomasse.
… et à l’excellence française
Le président Raoul de Parisot conclut : « Il faut valoriser les expertises et savoir-faire en actualisant immédiatement le corpus utilisé pour l’enseignement des élèves. Puis il faut augmenter les crédits alloués aux Centres d’études et de recherches sur les partenariats avec les entreprises et les professions. Enfin, il faut former en continu les ingénieurs territoriaux qui rédigent les cahiers des charges pour les ouvrages qu’ils commanderont« . Après son Green Deal cimentier, l’industrie du béton réclame donc un « New Deal » pour toute la filière, avec une politique de relance par des travaux. Alain Plantier, rappelle : « La culture du béton est ancrée dans notre société. Il ne faut pas perdre cette avance qui repose sur la valeur ajoutée comme la précontrainte ou les bétons ultra-hautes performances, développés par des industriels français« . La filière souligne les nouvelles fonctionnalités associées à son matériau, comme le béton structurel isolant, le béton dépolluant ou le béton drainant, qui aident à réduire l’ensemble des impacts sur l’environnement. Selon Raoul de Parisot, le seul composant à forte empreinte carbone du béton reste le ciment, qui ne représente que 12 % de sa composition au maximum. Le béton s’avèrerait-il donc plus vert que gris ?
source : Bati Actu