- MORT DU DESSINATEUR RICHARD CORBEN, MAÎTRE DE LA FANTASYJérôme LachasseLe 10/12/2020 à 17:28
Richard Corben – Dona Corben
L’immense auteur de BD américain, connu notamment pour ses adaptations d’Edgar Alan Poe, a eu une influence considérable sur ses pairs, de Joann Sfar à Mike Mignola, le créateur de Hellboy.
Le dessinateur américain Richard Corben, maître de la BD d’horreur et de la fantasy connu pour des titres comme Den et d’audacieuses adaptations d’Edgar Alan Poe, est mort le 2 décembre, annonce ce jeudi 10 décembre Delirium, son éditeur en France. Il avait 80 ans.
Auteur discret, mais véritable légende du 9e Art, Corben a suscité de nombreuses vocations, de Joann Sfar (Petit Vampire) à Riad Sattouf (L’Arabe du futur) en passant Jean-Marc Rochette (Le Transperceneige) et Mike Mignola (Hellboy). Il avait obtenu en 2018 le Grand Prix d’Angoulême, la récompense suprême du milieu de la BD. Plusieurs grands noms de la BD lui ont rendu hommage, comme Mike Mignola, Klaus Janson (The Dark Knight Returns) et Mark Millar (Kingsman), qui a incité ses fans à publier sur les réseaux sociaux leurs images favorites de Corben.
Influencé par Roger Corman, Richard Matheson et H.P. Lovecraft, Richard Corben avait un style très personnel, mélange d’hyperréalisme et de caricature souvent rehaussé par une mise en couleurs et des dégradés spectaculaires. A propos de Corben, Philippe Druillet, cofondateur de Métal Hurlant, avait déclaré qu’il avait inventé « la 3D en bande dessinée »: « le cadre, la couleur, les fractures dans la narration proches du cinéma sont un nouvel apport à la BD ».
« Les gens ne comprennent pas comment il dessine »
Ceux qui ont découvert les planches de Richard Corben dans les années 1970 dans les pages des revues de BD comme Actuel ou Métal Hurlant ne les ont jamais oubliées. Doté d’un « univers personnel qu’il livre sans censure » et fasciné par les corps extrêmement musclés, Richard Corben « a produit des images que lui seul peut produire », avait expliqué en 2019 à BFMTV Stéphane Beaujean, l’ancien directeur artistique du Festival d’Angoulême:
« Non seulement il dessine extrêmement bien, mais il a aussi tenté de nombreuses expériences, au point que son dessin apparaît souvent comme une forme de mystère. Les gens ne comprennent pas comment il fait. Quand vous êtes dessinateur et que vous pensez connaître le métier par cœur, cela n’arrive jamais. Pour cette raison, il a fasciné. Il a inventé des techniques de dessin, de mise en dessin difficiles à comprendre et à reproduire. »
De la littérature d’horreur en BD
Parmi ses chefs d’oeuvre comptent des récits de heroic fantasy comme Bloodstar et Den. Le lecteur y suit des colosses au corps hypertrophié affrontant dans des environnements dévastés et psychédéliques des créatures fantastiques.
« Un des rares [auteurs] à avoir réussi à faire de la littérature d’horreur en BD » selon Joann Sfar, Richard Corben était méconnu dans son pays d’origine, les Etats-Unis, et a bénéficié du soutien de ses idoles, comme Mike Mignola, qui lui a confié la mise en scène de plusieurs histoires marquantes de Hellboy, dont Hellboy au Mexique. Il a aussi travaillé chez Marvel, et signé quelques-unes des meilleures adaptations en BD d’Edgar Allan Poe (disponibles aux éditions Delirium et Panini Comics)
SUR LE MÊME SUJET
Si ses chefs d’oeuvre Den et Bloodstar ne sont plus édités depuis des années, les éditions Delirium avaient entrepris de republier son oeuvre. Sa dernière histoire publiée, Murky World, où Corben développait une vision particulièrement pessimiste du monde contemporain, venait de sortir dans les librairies. Il avait eu le temps d’achever une ultime histoire, Dimwood, « mais je ne sais pas quand elle sera en mesure d’être publiée », indique Laurent Lerner, son éditeur chez Delirium.
https://twitter.com/J_LachasseJérôme Lachasse
Journaliste BFMTV