EXCLUSIF SENEPLUS – La jeunesse a toujours eu une part belle dans les projets sociaux de nos gouver-nants ; seulement, l’on a adopté jusqu’ici des méthodes managériales basées sur des critères très sélectifs quant à l’accès des bénéficiaires
Partie nuitamment d’un salon de beauté privé une séance de massage a fini par entraîner le pays dans une tragique aventure. Une affaire privée entre deux citoyens, devenue subitement publique et virale juste parce que l’enjeu de la bataille était de situer de prime abord la réalité à laquelle rattacher les faits incriminés, parce que infamants :
1 – une réalité judiciaire d’un côté, fondée sur une relation ayant existé et une plainte en bonne et due forme
2 – une réalité populaire fondée sur des allégations de complot politique ourdi par le président de la République, comme réplique de la partie adverse.
Nous autres citoyens non concernés n’avons besoin que de la réalité ultime, fondée sur des vérités indubitables et l’attendons aujourd’hui d’une décision de justice. Chacun peut se ranger de quelque côté qu’il veut et penser ce qu’il veut en attendant, pourvu que l’expression des positions des uns et des autres soit empreinte d’assertivité. Cependant, le paradoxe flagrant en ce moment est qu’il y a des contempteurs de notre démocratie qui avec leurs acolytes, exercent en toute tranquillité une tyrannie sur ceux qui se révèlent d’une opinion différente de la leur.
Récuser la justice n’est pas une option
Quelles que soient les assertions de corruption, si pertinentes soient-elles, elles ne peuvent suffire à exclure la justice d’emblée. Il est impensable, tout comme l’est jeter le bébé avec l’eau du bain, de jeter l’institution judiciaire avec les accusations infâmes dont elle est le théâtre. De la corruption il y en a, cependant il n’y a d’ensemble plus vide, vide d’éléments, que l’ensemble qui regrouperait la chose « Justice corrompue ».
Il y a des subterfuges comme le populisme qu’il faut dénoncer clairement chaque fois qu’ils sont de mise si l’on ne veut pas qu’ils minent les fondements de la République et nous précipite dans le chaos. Taper dans la niche émotionnelle pour faire valoir ses arguments est une méthode rhétorique reconnue comme fallacieux depuis l’époque d’Aristote. Beaucoup d’hommes politiques sont très doués à en jouer et ne s’en privent pas pour abuser leurs audiences ; c’est de bonne tactique ! Toutefois, personne n’a l’apanage de l’émotionnel, la femme semble être dotée de cette puissante magie originellement. Adji Sarr, pour ne pas la nommer, est venue nous le rappeler en livrant pour la première fois sa version publiquement, retrouvant ainsi son adversaire sur son terrain favori. D’un état de conviction beaucoup de gens sont passés depuis à celui de scepticisme.
Heureusement que le calme et la paix sont revenus malgré les manœuvres captieuses d’hypocrites pyromanes. Car figurez-vous bien, ce retour à la normale n’arrange pas tout le monde. N’avez-vous pas constaté que c’est une génération de tout-jeune que l’on a surtout vu perpétrer les grabuges ? Cependant, à chaque fois qu’il s’est agi de revendiquer la paternité du mouvement, l’on a fait face à du « déjà vu », les mêmes figures d’une vielle génération de conspirateurs habituée à se greffer aux divers mouvements et dont l’ultime crédo est de damner le pouvoir quel qu’il soit. Curieux quand même que ce soient eux qui poussent l’idée de complot !
Alors merci de tout cœur aux vrais patriotes qui ont œuvré pour ramener le calme et la paix ; honneurs aux Khalifes religieux pour le rôle prépondérant qu’ils ont joué.
Les nuages prémonitoires de cette secousse grondaient sous nos pieds depuis des décennies
Point de méprise ! Nous avons simplement été rattrapés par les failles d’un système invariable. Ce n’est pas faute d’avoir oublié la jeunesse des programmes de développement que ces jeunes ont exprimé leur frustration par autant de violence. La jeunesse a toujours eu une part belle dans les projets sociaux de nos gouvernants ; seulement, l’on a adopté jusqu’ici des méthodes managériales basées sur des critères très sélectifs quant à l’accès des bénéficiaires. Or qui dit sélection dit implicitement exclusion de facto. De ce fait, une majorité de jeunes, exclue et oubliée des politiques ségrégatives des décennies durant, n’a cessé de grossir pour atteindre au finish une masse critique capable de transformer tout épiphénomène en catastrophe tragique. L’incident a Sweet beauty n’en a été que l’effet déclencheur. Le miracle aurait été une immunité à de telles manifestations. Alors aujourd’hui que cette masse se révèle à la face du monde, il n’y a d’autre priorité qu’elle. Je crois tout le monde l’a compris.
“Je vous ai compris” : paroles d’apaisement du président Macky
On ose espérer de bonne foi qu’avec le discours fondateur du président articulé autour d’une ample compréhension, qu’il ne sera pas question de se contenter de refaire davantage de ce que l’on a toujours fait. Il s’agit aujourd’hui d’instaurer rapidement un lien de confiance et susciter l’espoir d’une partie majoritaire de la jeunesse, dont le sentiment d’être des laissés pour compte n’autorisent pas une approche basée sur des concepts théoriques et débats abstraits. Il faut sortir des sentiers battus et des concepts illusoires pour partir de la réponse aux questions que tout être humain citadin ou rural se pose :
– quoi faire pour m’en sortir ?
– de quoi ai-je besoin pour me lancer dans ce que je veux faire ?
– que puis-je devenir demain de par mes propres efforts ?
Il faudrait aller chercher les réponses à ces questions à la couche basale de la société et dans les moindres recoins du territoire en passant par les leaders naturels actifs dans les Daras, dahiras, ASC, “Badienou gokh”, chefs de villages et de quartiers, garages automobiles etc… Ces réponses analysées permettraient de donner un contenu normatif pertinent à la politique à mener et la communication à tenir envers cette masse de jeunes.
Trois cents milliards, c’est relativement peu par rapport à la masse, mais si l’on s’attelle à créer avec chaque franc des opportunités qui en ouvrent d’autres, entraînant ainsi un effet domino, une bonne partie de la jeunesse y trouverait satisfaction.
Toutefois, pour qu’une approche du pouvoir ait un impact majeur sur cette jeunesse aujourd’hui, il semble nécessaire à l’aune des épreuves vécues récemment, que le président pose préalablement un acte fort d’affermissement du leadership au sommet. Un leadership fort est un leadership pluriel, constitué d’un pool de leaders soudés. L’environnement du pouvoir exécutif doit demeurer une forteresse inexpugnable de leadership. Il urge de raviver la relation d’empathie entre la jeunesse et le pouvoir. Cela passe nécessairement par un resserrement des rangs au sommet du pouvoir, qui n’a rien à voir avec un recrutement de jeunes tous azimuts, mais plutôt s’entourer que de personnes crédibles, loyaux, capables de sortir du tunnel et s’attaquer à l’essentiel. Il faudra également que les livrables dont la date est échue empruntent illico le fast track pour rattraper leur retard.
La tolérance zéro s’impose au sommet.