La Française, déçue par sa médaille d’argent à Rio en 2016, s’est depuis transformée en machine à gagner pour réaliser son rêve olympique.
L’amertume de Rio est désormais rangée au placard. Un grand sourire aux lèvres après avoir essuyé de grosses larmes, Clarisse Agbégnénou, quintuple championne du monde et d’Europe, a ajouté ce mardi 27 juillet le seul titre manquant à son palmarès : l’or olympique. Elle avait vécu sa finale perdue en 2016 comme un déchirement, elle en a fait la base d’une domination sans partage sur le judo mondial.
« Ce n’est pas la bonne médaille pour moi. » Il y a cinq ans, au moment de cette déclaration, Clarisse Agbégnénou, 23 ans, vient de décrocher la médaille d’argent aux Jeux olympiques de Rio. En finale, elle a subi la loi de Tina Trstenjak, parvenue à l’immobiliser. « Je suis en colère, réagit-elle alors. Je ne pense pas avoir été assez patiente ». L’année précédente, aux Mondiaux d’Astana, au Kazakhstan, la Slovène avait déjà dominé sa cadette, pourtant tenante du titre.
Un an pour digérer… avant de dominer
Un problème de digestion pour Agbégnénou ? Entre son premier titre mondial, en 2014, et la finale des JO 2016, elle s’était « contentée » du bronze aux Jeux Européens 2015 et de l’argent aux Mondiaux. Des problèmes physiques n’ont pas aidé à assumer son statut. À Rio, Agbégnénou raconte « un stress permanent » et inédit pour l’habituelle insouciante.
Mais l’indigestion est passée. L’appétit est revenu. Et la frustration de Rio est devenue le premier pavé d’une route construite jusqu’au sacre olympique. Pendant cette anormalement longue olympiade, Clarisse Agbégnénou a écrasé la concurrence. Elle a remporté les quatre titres mondiaux possibles, dont un en dominant Tina Trstenjak en finale (2017). Elle s’est offerte trois titres européens sur cinq. Ses deux manqués ? Un forfait en demi-finale en 2017 et une impasse cette année, pour mieux préparer les Jeux olympiques avec sa qualification déjà en poche.
Bilan : 92 combats depuis sa finale olympique brésilienne, 88 victoires et quatre défaites. Depuis 2017 et une dernière défaite contre Trstenjak, en finale du Grand Slam de Paris, Agbégnénou ne s’est inclinée qu’une seule fois (en décembre 2019 face à la Japonaise Nami Nabekura). Face à sa bête noire slovène, elle a enchaîné trois succès d’affilée. Idéal au moment de la retrouver en finale à Tokyo.
Impériale du début à la fin
Le piège posé à Rio par la Slovène n’a cette fois pas perturbé Agbégnénou. Dominatrice dès les premières minutes, elle a réduit Trstenjak au silence. Une première pénalité, une deuxième. Face à l’imminence d’une défaite aux cartons jaunes, la championne olympique n’a presque jamais pu passer à l’offensive et elle n’a pu éviter l’ultime attaque de la tricolore dans le golden score. Au sol, elle a pris dans ses bras sa successeure, et ne peut que reconnaître sa supériorité depuis cinq ans.
« C’était la journée la plus dure mentalement mais finalement c’était la plus simple, a lâché Agbégnénou après sa victoire. J’ai enfin cette médaille, je n’y crois pas. J’étais en mission. Je n’ai pas les mots. C’est incroyable.« Et de savourer ce scénario proche du cinéma. « C’est une judokate hors-pair, a-t-elle souligné. Cette journée a été très dure pour nous deux, je pensais me retrouver contre la Japonaise (Miku Tashiro, éliminée dès les 8e). Pouvoir prendre ma revanche cinq ans après, je ne pouvais pas rêver mieux. »
Aux larmes de Rio ont succédé celles de Tokyo. Cinq ans de la tristesse à la joie. Le sacre tant attendu d’un parcours hors du commun, et d’une championne désormais dans la légende du judo français.