Pour Annie Jouga, également membre de l’Ordre des architectes, les autorités sénégalaise « ne font pas mieux que les colons (français) qui ont démoli l’identité des premiers habitants de Dakar »
Le marché Sandaga, un édifice d’architecture soudano-sahélienne construit en 1933 dans le centre, hébergeait des centaines d’étals et était l’un des principaux de Dakar durant près d’un siècle jusqu’à sa fermeture en 2020. Le bâtiment central du marché menaçait ruine, avec sa dalle craquelée et ses fers rouillés. Les autorités avaient annoncé vouloir, pour des raisons de sécurité, le réhabiliter et le reconstruire à l’identique en y aménageant notamment un parking sous-terrain. La date du début des travaux n’était pas précisée.
Si les échoppes bordant le marché avaient été détruites en août 2020, le bâtiment central était resté intact, jusqu’à sa démolition dans la nuit de jeudi à vendredi. »C’est vraiment regrettable. Cette destruction ne se justifiait pas », a dénoncé auprès de l’AFP le président de l’Ordre national des architectes, Jean Augustin Carvalho. Sandaga est « un patrimoine et une identité de la ville de Dakar. Il fallait par tous les moyens voir comment le préserver », a-t-il souligné. « Cet édifice pouvait encore tenir debout avec une réhabilitation, mais qui veut tuer son chien l’accuse de rage… ». « Des solutions techniques pour la conservation de ce patrimoine existent », a assuré Papa Dame Thiaw, un autre responsable de l’Ordre des architectes. Cela passait notamment, selon lui, par « le renforcement de la structure, la création de nouveaux poteaux ». « Des bâtiments plus dégradés que Sandaga ont été réhabilités », a-t-il estimé.
Pour Annie Jouga, également membre de l’Ordre des architectes, les autorités sénégalaise « ne font pas mieux que les colons (français) qui ont démoli l’identité des premiers habitants de Dakar », ancienne capitale de l’Afrique occidentale française. « C’est un scandale ». »C’est un bluff de dire qu’on va reconstruire à l’identique. On ne peut pas reconstruire à l’identique un bâtiment de 1933 avec des techniques modernes », a-t-elle ajouté.
La halle de Sandaga, qui tire son nom d’un arbre tropical, n’hébergeait plus d’échoppes. Le ministère de l’Urbanisme avait aménagé en 2020, à deux km du marché Sandaga, un site pour une « réinstallation provisoire » des commerçants.
La réhabilitation de Sandaga est censée prendre deux ans. Le maire de Dakar Plateau, Alioune Ndoye, également ministre de la Pêche, qui assure la tutelle administrative du marché, a annoncé qu’il s’exprimerait lundi sur la question.