Salif Traoré dit A’salfo, Commissaire Général du festival : « Le Président Macky Sall a fortement contribué à la réussite du Femua13 »

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Macky SALL © Malick MBOW
Macky SALL © Malick MBOW

Abidjan a accueilli du 6 au 12 septembre, la 13ème édition du Festival des musiques urbaines d’Anoumabo (Femua). À l’heure du bilan, le Commissaire général Salif Traoré dit A’Salfo se réjouit de la forte contribution du Président Macky Sall à la réussite du Femua 13. 

Propos recueillis à Abidjan par E. Massiga FAYE  

Comment est née cette idée de créer un festival dédié aux musiques urbaines ? 

C’est déjà ce ressenti de revenir en arrière pour donner un peu de ce qu’on a gagné aux autres. On fait partie de ce petit village pauvre (Anoumabo). On connaissait les conditions dans lesquelles vivaient les populations. Et on a eu la chance de partir, de connaître le succès. Il fallait donc revenir, faire quelque chose pour le village, un petit concert et chanter pour les villageois. Mais, on n’avait jamais pensé que ce petit concert qu’on voulait donner allait être un gros évènement panafricain. On y est allé doucement, mais c’est la réaction des populations qui nous a amené à instituer ce festival.

Comment le projet s’est-il développé ? 

Il est allé crescendo, à partir d’un petit concert. J’avais des amis qui jouaient dans le championnat anglais, Olivier Kapo notamment. Je suis allé le voir lors d’un match pour lui demander si son club n’avait pas de maillots qu’il n’utilisait pas pour qu’on puisse les offrir aux jeunes footballeurs du village. Le club met des maillots à notre disposition, j’achète quelques ballons pour compléter. On fait la petite action sociale avec un équipement qu’on offre au centre de formation du village. On avait un partenaire qui nous donnait des médicaments, on est venu à l’hôpital du village. C’est comme ça que le volet social a commencé à se développer et à prendre le dessus sur le volet musical.

Avec une forte assise locale, le festival a pris une dimension panafricaine… 

C’est un festival qui a commencé au fur et à mesure à s’élargir à d’autres volets. Au départ, il était musical comme tout bon festival, mais le volet social était en train de devenir l’artère principale. Après, il y a eu le volet scientifique, Tic, sportif, des volets qui pouvaient fédérer, parce que l’objectif du Femua, c’était de rassembler chaque année. Là où le festival prend son envol, c’est à partir de la troisième édition où nous décidons de construire une école au village. On a construit la première école Magic System qui sera inaugurée au Femua4. Il y a eu la crédibilité, la confiance des autres partenaires et le Femua a pris son envol. Nous sommes aujourd’hui à six écoles construites et pour les deux autres, nous avons fait la pose de la première pierre pendant ce Femua. À la fin de cette année, nous serons à huit écoles Magic System.

Qu’en est-il du rôle des artistes locaux ? 

Un artiste, c’est un artiste. L’atout majeur des artistes qui sont sur place, c’est qu’ils attirent un public qui découvre en même temps les artistes qu’il ne connaît pas. C’est comme si on invitait un artiste ivoirien au Sénégal. Tout le monde viendra pour voir Pape Diouf ou Youssou Ndour. Mais ça donnera une occasion à ce public de découvrir un artiste ivoirien qu’il ne connaissait pas.

Pourquoi cet intérêt pour les musiques urbaines ? 

Pour moi, tout ce qui est urbain rentre dans le contexte de ce festival. La musique urbaine joue le même rôle que le mbalakh, la rumba, qui sont, à la base, des musiques nobles, mais qui ont une certaine proximité avec les populations. Toute musique qui fédère, toute musique qui parle des valeurs, qui peut rassembler, est une musique qui a sa place au Femua. Ce n’est plus seulement une musique urbaine, pas un festival de musique urbaine, mais un festival tout court, un festival de partage, qui permet à toutes les cultures de se rencontrer.

D’où cette diversité dans le contenu ? 

C’est pour montrer que la musique n’est plus cette expression que les gens connaissaient. L’artiste n’est plus le dernier de la classe sociale comme on pouvait le constater jadis, mais celui qui contribue fortement au développement de son pays. On a voulu, à travers ce Femua, montrer que nous ne chantons pas seulement, mais nous apportons notre grain de sel à l’évolution du continent africain et plus particulièrement de la Côte d’Ivoire. On voulait montrer qu’avec la musique, on peut construire des écoles, des hôpitaux, qu’on peut éduquer une jeunesse, mettre une formation en place. C’est ce que nous essayons plus ou moins de faire avec ce festival. Après 13 éditions, on peut dire qu’il y a beaucoup de satisfactions.

L’accompagnement de l’État ivoirien a été déterminant… 

Pour que le Femua arrive à ce niveau, il a fallu un accompagnement. Il y a des sacrifices qui ont été consentis par le comité d’organisation pendant une dizaine d’années et après, l’État a vu qu’il fallait apporter un plus à ce festival pour qu’il se développe mieux. L’État nous accorde une subvention annuelle qui nous permet de pouvoir asseoir ce festival comme il se doit. Il y a aussi un appui de partenaires commerciaux et institutionnels qui nous permet de faire face à tous ces postes de dépense, particulièrement la participation de treize pays. Le déplacement d’un seul pays, ce n’est pas moins de 50 millions de FCfa. Donc, ce sont des sommes importantes, et grâce à l’État de Côte d’Ivoire et à nos partenaires, on arrive à s’en sortir. Mais, on a besoin davantage de soutien pour pouvoir élargir ce festival.

Le Sénégal, pays invité d’honneur… 

C’est un choix naturel, logique. Le Sénégal compte une forte communauté en Côte d’Ivoire. Des liens historiques unissent nos deux pays depuis Houphouët Boigny et Léopold Sédar Senghor et la complicité entre les Présidents Alassane Ouattara et Macky Sall le confirme. La nature a voulu que nos deux pays soient très proches, fraternels. Et aujourd’hui, on est amené à renforcer ces liens d’amitié et de fraternité entre nos deux pays en passant par la culture. Tout le monde connaît la richesse culturelle du Sénégal et pour nous, c’était important d’inviter ce pays frère pour partager cette richesse avec les Ivoiriens.

Journée dédiée au Sénégal… 

Ce qui m’a le plus marqué, c’est la jeunesse des talents. J’ai été frappé par une jeune couturière, Maguette Guèye, qui expose des modèles qui parlent de la vieille tradition sénégalaise, comment les reines s’habillaient. La styliste met en lumière le Sénégal dans toute sa diversité. Après elle, il y a eu tous ces chanteurs qui sont venus chacun avec son style. La cerise sur le gâteau, fut la découverte de Pape Diouf par le public ivoirien. Les mélomanes l’ont vu, adulé. Il y a même eu une demande générale qui l’a contraint à rester en Côte d’Ivoire pour donner un spectacle supplémentaire. En tant qu’organisateurs, on ne peut que tirer notre satisfaction d’avoir invité le Sénégal.

Quel a été l’apport de l’État du Sénégal ? 

C’est un très gros apport, logistique, humain, financier. L’État sénégalais a mis les moyens pour que tout ce monde soit là. J’ai échangé avec le Président Macky Sall qui a fortement contribué à la réussite de ce festival. Je profite de l’occasion pour lui adresser un grand merci. Son ouverture d’esprit, son accompagnement de la culture doit être un exemple, enseigné dans plusieurs États africains. Si tous les Présidents africains avaient cette vision, de se mettre ensemble pour accompagner la culture comme il se fait en Côte d’Ivoire et au Sénégal, je crois qu’on gagnerait beaucoup. Le Président Macky Sall a compris que la culture est un vrai canal. Je n’ai pas manqué de lui dire de vive voix toute mon admiration de sa politique culturelle qu’il a mise en marche.

Le Femua 2021, c’est 13 pays invités, une tête d’affiche… 

Mes relations avec Koffi Olomidé, ce sont des relations fraternelles. Il fait partie des gens qui ont tracé les sillons de la musique africaine, qui ont ouvert le chemin et on a suivi. J’ai une admiration pour la carrière de ce monsieur. Je lui voue un véritable respect. L’inviter à mon festival est un honneur. Quant à Pape Diouf, c’est la nouvelle génération, une génération montante. C’est quelqu’un que j’ai eu la chance de rencontrer à Dakar. Il m’a rendu les honneurs de grand frère que je suis. Cela m’a beaucoup marqué. On s’est ensuite rendu compte que c’est un artiste, une étoile montante, quelqu’un qui doit être valorisé. C’était un bon choix et il va revenir.

Comment se porte le groupe Magic System… 

Magic System est toujours là. La pandémie de Covid-19 avait tout mis en berne, mais nous en avons profité pour enregistrer un nouvel album destiné à l’Afrique qui vient juste de sortir. Nous allons mettre en place une grosse tournée africaine en place. Je vous rassure que Dakar occupe une bonne place dans cette tournée.

Que représente pour vous Anoumabo ? 

Anoumabo, c’est notre vie, notre école. Nous y avons appris l’école de la vie. Il nous a appris les rudiments de la vie sous toutes ses formes. On a appris à être citoyens, citadins, villageois, toutes les coutumes et ce que je retiens, c’est que nous avons acquis des valeurs et ce sont ces valeurs-là qui nous ont permis d’être là aujourd’hui. C’est pour cela que nous témoignons toute notre reconnaissance à la population d’Anoumabo. Quel que soit ce que nous allons faire, nous ne serons jamais au niveau du remboursement, au niveau de ce que nous lui devons. Parce qu’Anoumabo, c’est tout pour nous.

Comment se profile le prochain Femua ? 

La 14e édition sera la plus difficile, surtout pour le choix du pays invité d’honneur. Le Sénégal a tellement tout donné que même en comité d’organisation, on s’est dit s’il y aurait un pays qui ferait mieux. Le Sénégal a mis la barre haut et c’est cela la première difficulté. Le Femua 14 va se tenir dans un contexte un peu plus apaisé, sur le plan sanitaire. Il s’annonce donc très challengé parce que le Femua13, malgré le contexte, s’est bien déroulé. Ce qui est sûr, c’est qu’on promet un Femua14 très inédit.

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