Choc d’attractivité, revalorisation, moins de bureaucratie… L’Express a demandé aux candidats élyséens un état des lieux et leurs propositions pour sortir de la crise le système hospitalier à bout de souffle.
Des esprits tatillons qualifieraient le phénomène de paradoxal. Moins de deux ans après le début de la crise sanitaire qui a jeté sur l’hôpital public une lumière crue, les conditions de travail des médecins, du personnel médical et paramédical, la qualité de la prise en charge des patients, l’offre de soins, l’état des équipements n’occupent qu’une place infinitésimale dans les discours des candidats à la présidentielle. Que pensent ceux qui espèrent être demain aux manettes d’un pays encore secoué par une épidémie dont les rebonds nous paraissent non seulement interminables mais surtout imprévisibles ? Comment imaginent-ils la situation dans ces hôpitaux en crise ? Quelles améliorations envisagent-ils ?
Nous avons demandé aux différents candidats leur(s) mesure(s) forte(s) pour sauver l’hôpital public. Parmi ceux que nous avons interrogés, certains se prononcent pour la première fois sur le sujet. Emmanuel Macron, pas encore déclaré mais déjà à l’Elysée, a, lui, juré lors de sa récente allocution que « jamais, depuis la création de la Sécurité sociale, nous n’avions autant investi dans la santé » – rappelant que 19 milliards d’euros vont permettre de financer la rénovation des établissements hospitaliers « partout sur le territoire ». Dans son entourage, on assure que le président-s’il-est-candidat, souhaite « accentuer le Ségur en investissant davantage dans le foncier et dans l’attractivité des métiers, accroître la numérisation de l’univers médical, renforcer la dimension psychologique dans les formations ». Et, bien entendu, reprendre à son compte le projet de « Grande Sécu » mis sur la table par Olivier Véran.
Valérie Pécresse : « Refonder l’hôpital public au service des malades »
Face à la crise l’hôpital a tenu, mais à quel prix ? Nos soignants ont été durement éprouvés. Conséquences : de nombreuses démissions, des fermetures de lit et une pénurie de médecins, qui menace la qualité des soins.
Je veux plus de soignants pour l’hôpital. Pour recentrer l’Etat autour des trois missions « éduquer, protéger et soigner », je souhaite former et recruter 25 000 soignants supplémentaires sur le mandat, car il faut augmenter le temps médical au lit des malades. Je lancerai un audit sur les investissements nécessaires car les besoins sont criants, en s’appuyant aussi sur les évaluations des usagers de l’hôpital, systématiquement collectées et publiées.
Je veux donner beaucoup plus de liberté et de responsabilités aux médecins chefs de service sur les investissements et les recrutements. Il faudra alléger drastiquement les contraintes bureaucratiques qui génèrent trop de coûts administratifs au détriment des dépenses de soins. Les hôpitaux pourront choisir le statut plus souple de fondation, comme les centres de lutte contre le cancer.
Je veux que les Régions président les agences régionales de santé pour qu’elles organisent une étroite coopération entre hôpitaux publics et privés et médecins libéraux. Les financements hospitaliers seront liés davantage à des engagements de qualité, comme les délais maximaux pour obtenir un rendez-vous. Enfin, je reconnaîtrai pleinement les missions de service public des hôpitaux privés afin de mieux intégrer leurs services d’urgence au dispositif sanitaire.
Yannick Jadot : « Nous reviendrons sur la tarification à l’acte »
Il faut inverser la logique de gestion, radicalement. Plutôt que de fixer un budget national décliné localement qui met tout le monde sous pression, il faut repenser l’offre de soins en fonction des territoires, par bassin de santé, avec tous les acteurs de la santé, les collectivités et les patients, et adopter un ratio de personnels par population. Dans chaque région, les moyens des hôpitaux publics devront être fixés selon la démographie, les âges, la situation sanitaire. Dans chaque établissement, comme pendant la crise sanitaire, l’organisation devra être définie par les médecins et les personnels soignants eux-mêmes. Nous reviendrons sur la tarification à l’acte et renforcerons les salaires et les effectifs.