Michel-Yves Bolloré : « Si l’Opus Dei était une société secrète, nous serions très mauvais »

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Big bang, darwinisme, miracles, foi catholique… Le co-auteur de « Dieu, la science, les preuves » s’explique en longueur sur les thèses controversées du best-seller.

Durée : 17 min

 

L’homme d’affaires Michel-Yves Bolloré

 

Propos recueillis par Etienne Girard et Thomas Mahler

Publié le 20/12/2021 à 18:05

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C’est le best-seller surprise de cette fin d’année (70 000 exemplaires déjà vendus). Dieu, la science, les preuves (Guy Trédaniel) affirme « révéler les preuves modernes de l’existence de Dieu ». Ses auteurs, Michel-Yves Bolloré et Olivier Bonnassies, sont ingénieurs de formation et fervents catholiques de conviction. Le premier est le frère ainé du milliardaire Vincent Bolloré, avec qui il a relancé le groupe familial au début des années 1980. En 1990, il a fondé le groupe France-Essor, centré sur l’industrie mécanique. Pendant deux heures, affable, le Breton a accepté de débattre avec l’Express des thèses controversées du livre. Il s’est aussi expliqué sur son appartenance à l’Opus Dei. Entretien.

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L’Express : Comment est né ce livre sur les liens entre Dieu et la science? 

Michel-Yves Bolloré : J’ai toujours été passionné par les récits scientifiques et les histoires des découvertes. Depuis longtemps, je lis beaucoup de choses sur l’intersection entre la science et la métaphysique. Chaque découverte – Copernic, Darwin… – a entraîné des réflexions philosophiques. Or, ce qui s’est passé au XXe siècle, notamment en matière de cosmologie, est passionnant.

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Je connais Olivier Bonnassies depuis une quinzaine d’années. Nous nous sommes rencontrés à un forum qu’il avait créé pour collecter des fonds pour le site d’informations catholiques Aleteia. Un jour, en discutant, je lui ai confié que je voulais faire un livre sur Dieu et la science. Lui aussi avait la même envie. On s’est donc dit qu’en se mettant à deux, on y arriverait. Cela nous a pris trois ans et demi. On était d’accord sur le fait que ce livre devait être accessible à tout le monde. Les idées qui sous-tendent les relations entre la science et Dieu sont en fait très simples. L’univers est-il éternel ou a-t-il un commencement et une fin ? Repose-t-il sur des réglages précis ? On a mis tout ce qui renvoie à des références scientifiques en bas de page ou dans des annexes.

Nous avons ainsi cherché un chemin de crête entre l’exactitude et l’accessibilité. Nous racontons notamment le « roman noir du big bang », c’est-à-dire la persécution dans les pays totalitaires, URSS et Allemagne, de savants qui croyaient en l’expansion de l’univers. Nous avons aussi fait un cahier de citations de très grands savants sur le sujet. Parce que ces scientifiques ont découvert des choses qu’ils ne voulaient pas découvrir. Si on revient cent ans en arrière, tout le monde pensait que l’univers était éternel, infini et stable, ce qui est intuitif. Mais depuis, nous avons réalisé que l’univers a eu un commencement avec le big bang ou avant, et une fin, avec la mort thermique. Einstein lui-même reconnaît qu’il ne voulait pas de la théorie de l’expansion de l’univers, parce qu’il n ‘était pas religieux et que cela le dérangeait. Pour lui, cela ressemblait trop à la Création, ce qu’il appelait en privé de la « physique de curé ». Il n’est pas seul dans ce cas. De nombreux prix Nobel, agnostiques ou athées, ont exprimé leur surprise.

« Nous n’avons ni le désir ni l’ambition de militer pour une religion » écrivez-vous. Pourtant, votre livre ressemble à un plaidoyer pour une religion en particulier, la religion catholique…

Notre désir était d’écrire un livre neutre. Notre démarche est celle de la recherche d’un horloger dans l’univers. Et s’il existe un horloger, qui est-il ? Mais bien sûr, nous sommes ce que nous sommes…

« On voudrait que Dieu ait raconté la création du monde comme un cours de sciences naturelles à l’école? »

Mais votre livre ressemble fortement à une démonstration. Selon vous, il existerait bien un « horloger ». Et celui-ci serait le Dieu de la Bible, comme le prouveraient selon vous des révélations faites au peuple juif, tout comme le « miracle » de Fatima…

Pour qu’une thèse soit considérée comme scientifique, il faut qu’elle ait des implications vérifiables dans le monde réel. Par exemple, la théorie des multivers, très en vogue, n’a aucune implication : on ne saura probablement jamais s’il y a des univers parallèles. Par contre, la thèse de l’inexistence de Dieu a des implications fortes. Cela voudrait dire que tout obéit aux lois naturelles, et au hasard et à la nécessité. A partir de là, il ne peut y avoir de miracle, quel qu’il soit, ou alors c’est que la thèse initiale s’avère fausse. Parce que nous sommes catholiques, nous avons choisi de décrire un miracle catholique, celui de Fatima, mais je suis sûr qu’il existe des miracles dans d’autres endroits. Nous essayons dans ce livre de donner aussi des explications matérialistes à ce phénomène. Peu de ce que nous pensons transparaît. Le lecteur a les éléments en main, à lui de choisir.

A vous lire, le peuple juif aurait eu accès à des « vérités humainement inatteignables », alors que la recherche historique a montré que le monothéisme juif est le fruit d’un long processus historique, sous l’influence notamment du mazdéisme en Perse ou de l’exil à Babylone…

Des civilisations extraordinaires, comme les Egyptiens ou les Babyloniens, pensaient que le soleil et la lune étaient des divinités. Mais un petit peuple semi-nomade, occupant un modeste territoire en partie désertique, a compris que ces astres ne sont que de simples luminaires. Vous pouvez dire que c’est de la chance, ou bien que c’est une révélation. Mais, par ailleurs, contrairement à ces civilisations, les Hébreux savaient aussi que l’univers a un début et une fin et qu’il n’est donc pas cyclique, ou que nous descendons tous d’une même origine, ou que les forces de la nature – mers, forêts, sources, montagnes… – n’avaient rien de divins. Ces bergers se sont cramponnés à des vérités qui n’avaient rien à voir avec les croyances de voisins, pourtant bien plus puissants qu’eux.

La Genèse nous enseigne par exemple que le monde a été créé en six jours, alors que l’Univers a plus de 13 milliards d’années. Cela fait une petite différence…

Le mot « milliard » n’a été inventé qu’au XVe siècle par des mathématiciens français. Le terme, comme le concept, n’existait pas à l’époque. Il était littéralement impossible d’expliquer aux Hébreux que le monde a été créé il y a 13 milliards d’années. D’ailleurs, nous ne connaissons l’âge de l’Univers que depuis cinquante ans, et il se peut que cette estimation soit modifiée dans le futur. Dans ces conditions, l’auteur de la révélation a choisi de transmettre des choses imagées, qui ne changent rien d’un point de vue des conséquences métaphysiques.

La Genèse nous apprend aussi que Dieu aurait créé les plantes le troisième jour, et le soleil le quatrième. Un élève de collège comprendrait qu’il y a là un problème…

Les croyants comme les non-croyants ne doivent pas faire de concordisme. On voudrait que Dieu ait raconté la création du monde comme un cours de sciences naturelles à l’école? Mais il faut bien comprendre que ce n’était pas possible vu l’état des connaissances à l’époque, et qu’en plus cela n’aurait servi à rien. Ce que Dieu veut communiquer aux hommes, ce sont des vérités qui concernent la métaphysique. L’important, c’est ainsi de savoir que l’univers a été créé progressivement, et qu’il n’est pas éternel. Ce sont deux vérités importantes que les autres peuples ne possédaient alors pas.

LIRE AUSSI >> François de Smet : « Il y a autant de sens de croire en un monstre en spaghetti volant qu’en Dieu »

On souligne aussi souvent, pour railler la Bible, que la lumière est créée avant même l’apparition de sa source que sont les étoiles. Or, les découvertes du XXe siècle ont montré que la lumière a bien émergé de l’Univers primordial, au bout de 380 000 ans seulement, bien avant les étoiles, lorsque la baisse de la densité de l’Univers permit aux photons originels, qui étaient en un incessant mouvement erratique, de commencer à se propager en ligne droite.

« Le Dieu créateur savait sans doute où cela aboutirait »

Et en quoi la Bible pourrait-elle être compatible avec la théorie de l’évolution? 

En lisant que Dieu a façonné le premier homme en un jour, avec de la terre, les critiques se moquent une fois de plus de la Bible, car l’homme n’est qu’un primate évolué qui n’est que le dernier maillon d’une longue lignée de l’évolution. Mais si l’on remonte toute la chaîne du vivant, notre véritable ancêtre de toute vie sur Terre s’appelle LUCA (Last universal common ancester), qui serait apparu il y a 3 milliards d’années, sous forme d’un organisme unicellulaire. C’est un pur assemblage de protéines et de macromolécules, c’est-à-dire de molécules, d’atomes et de particules. Soit de la matière intelligemment agencée. En affirmant que l’homme est fait de terre, autrement dit de matière, la Bible n’a commis aucune erreur. Le fait de dire que nous descendons de la matière est ainsi plus juste scientifiquement que de dire que nous descendons de primates, et métaphysiquement, c’est bien plus important. L’homme ne doit pas s’enorgueillir, car il n’est que poussière.

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