Cinq ans après ses presque 20 % à la présidentielle, le leader de la France insoumise n’a pas surmonté son problème : paraître crédible pour exercer le pouvoir.
Saluons la performance politique. Qu’importent les statistiques exactes, Jean-Luc Mélenchon a une nouvelle fois réuni, dimanche 20 mars, près de 100 000 personnes lors de sa marche pour la VIe République, démontrant l’enthousiasme autour de son nom. Qu’importe la faiblesse des autres candidats, socialiste, écologiste et communiste, le leader des Insoumis écrase à nouveau la concurrence à gauche.
Comme il y a cinq ans, à un mois du premier tour, ses intentions de vote tournent autour de 13 % : ses soutiens en sont persuadés, la qualification est possible. Le trou de souris est en train de s’élargir. Continuité dans les sondages, continuité dans le programme… Même si une victoire face à Emmanuel Macron paraît improbable, le septuagénaire serait-il parvenu, en l’espace de sept ans, à construire la nouvelle gauche de gouvernement ?
Il est permis d’en douter. Au fond, qu’a de plus le Mélenchon de 2022 par rapport au Mélenchon de 2017 ? Est-il mieux armé ? Le quinquennat qui vient de s’écouler a sans doute fait plus de tort que de bien au tribun et, par extension, à son courant politique. Certes, ce dernier a fait émerger quelques jeunes cadres, devenus pour la plupart des parlementaires expérimentés. Il a même édulcoré une partie de son programme, notamment sur le volet européen : le vrai-faux Frexit du plan A-plan B a été mis de côté pour embrasser un plus large public. Pour autant, imagine-t-on les Insoumis au pouvoir ? Les perquisitions, les outrances, ses ambiguïtés sur les valeurs républicaines et, dernièrement, ses revirements à propos du pouvoir russe n’ont pas permis à Jean-Luc Mélenchon de gagner en « présidentiabilité », comme le disait Lionel Jospin. Peut-être même a-t-il perdu des points en la matière ; ses proches le reconnaissent à demi-mot…
L’ère qui vient, post-mélenchonienne, est semée d’obstacles. Stratégiquement, le choix de faire l’impasse sur les élections locales, signe de la faible implantation de son mouvement gazeux (maquillée en main tendue vers les autres formations de gauche), est un écueil difficile à contourner. De même qu’un score moins important qu’il y a cinq ans peut laisser présager la disparition de son groupe à l’Assemblée. Reste à savoir quelle place voudra prendre la France insoumise dans la future recomposition de la gauche. Incapable de gagner seule, elle devra s’allier, amender son projet, quitte à perdre en radicalité.