Contrairement à ce que véhicule la presse occidentale, un pays qui a donné au monde Léon Tolstoï (auteur du Roman Guerre et Paix, le plus grand roman de tous les temps) ne peut être barbare
En faisant le bilan de l’Oua, il est toujours de bon aloi d’insister sur la décolonisation du continent et la fin de l’odieux système d’apartheid. L’Union Soviétique pour ne pas dire la Russie, a beaucoup contribué à ces deux grandes victoires historiques de l’Oua. De Gaulle, qui avait un grand sens de l’histoire, a toujours vu la Russie éternelle derrière la parenthèse historique et conjoncturelle soviétique. Donc l’Urss, de son apogée dans l’après-deuxième mondiale, jusqu’ à son effondrement dans les années 1990, a été l’une des deux grands des relations internationales avec les Etats-Unis, dans le contexte de la guerre froide et la bipolarité du monde qui lui était consubstantielle.
L’Union soviétique et les Etats-Unis, les deux nouvelles grandes puissances issues de la deuxième guerre mondiale, ont pesé de tout leur poids dans le mouvement de la décolonisation et avant de se partager le monde en sphères d’influence. Ce qui explique une forte présence de la Russie sur le continent aux côtés des pays dits progressistes, dont faisait partie l’Angola où le Président Macky Sall s’est rendu récemment.
L’Angola est un excellent exemple de longue présence et influence russe en Afrique. La Russie a contribué à décoloniser ce pays en aidant le Mpla (Mouvement populaire pour la libération de l’Angola) à libérer le pays de la colonisation portugaise. Mieux encore, elle a aidé ce pays à se défendre contre les agressions militaires du régime de l’apartheid, par le biais des soldats cubains. D’ailleurs l’indépendance de la Namibie, occupée par l’Afrique du Sud, interviendra dans le cadre d’accords fondés sur le retrait des Cubains d’Angola et des Sud-Africains de Namibie. L’Angola est un bon exemple de la contribution de la Russie dans les deux plus grandes victoires de l’Oua, à savoir la décolonisation et la fin de l’apartheid.
Cette influence russe, qui remonte à la guerre froide, était aussi à nos frontières avec le Mali de Modibo Keïta et la Guinée de Sékou Touré, qui étaient dans la sphère d’influence socialiste pour ne pas dire russe, mais aussi à l’intérieur de notre pays, avec des partis de gauche et d’extrême gauche comme le Pai, le Pit, la Lct… Les trois pôles de l’influence russe en Afrique seront les idées communistes, l’Université Patrice Lumumba et la coopération militaire, qui produira par exemple le Colonel Sadio Camara, l’actuel ministre de la Défense du Mali, et porte d’entrée de Wagner, sans oublier le Premier ministre Maiga, un ingénieur formé en Russie.
Les idées communistes se sont effondrées avec la Mur de Berlin et la dislocation de l’Urss, l’Université Lumumba a perdu de sa superbe et de sa notoriété, et la présence militaire reste encore balbutiante. Le messianisme communiste sur lequel la Russie de Lénine et de Trotsky voulait s’appuyer pour conquérir le monde sera qualifié par l’historien François Furet, après la fin de l’Urss, de «passé d’une illusion». Mais ce que la Russie apporte au monde et qui transcende les régimes politiques (Pierre le Grand en passant par Catherine II, Nicolas II, Lénine et Poutine) est à coup sûr sa littérature et sa culture.
Contrairement à ce que véhicule la presse occidentale, un pays qui a donné au monde Léon Tolstoï (auteur du Roman Guerre et Paix, le plus grand roman de tous les temps) ne peut être barbare, sans parler du Docteur Jivago de Boris Pasternak, merveilleusement adapté au cinéma avec Oumar Sharif. Dostoïevski, Pouchkine, Vassili Grossman et le musicien Tchaïkovski, avec qui Nixon aimait passer ses soirées dans la solitude à la Maison Blanche, selon Kissinger. La musique de Tchaïkovski, qui détendait le très angoissé Nixon, a peut-être indirectement contribué à la politique de détente entre les Etats-Unis et l’Urss. La musique adoucit les mœurs, même politiques.