Rachel Kéké, femme de chambre de 47 ans, se dit « guerrière ». Après avoir mené avec succès l’une des plus longues grèves de l’histoire de l’hôtellerie en France, cette Ivoirienne d’origine est l’un des nouveaux visages de la gauche à l’Assemblée nationale
Élue dimanche au deuxième tour des législatives avec 50,30% des suffrages, cette mère de cinq enfants née en 1974 à Abidjan, est venue en France en 2000, à l’âge de 26 ans. Siéger à l’Assemblée nationale « ne me fait pas peur », assurait-elle pendant la campagne. Investie par la France insoumise de Jean-Luc Mélenchon, elle siègera avec la Nouvelle Union populaire, écologique et sociale réunissant les partis de gauche.
Seule incarnation des classes populaires ou presque, elle va se retrouver face à des professionnels de la politique. « Ils ne savent pas la souffrance des gens », assure Rachel Kéké, qui aspire à « expliquer » aux autres députés la « réalité » des plus pauvres.
Un discours volontaire, puisé dans ses luttes récentes. En mai 2021, 19 femmes de chambre et un collègue équipier d’un hôtel parisien, menés par Rachel Kéké, réussissent à faire plier un sous-traitant du groupe Accor. Après 22 mois de grève et de chômage partiel, la plus longue lutte jamais menée par le syndicat hôtelier CGT-HPE, les grévistes voient notamment leurs rémunérations augmenter « de 250 à 500 euros par mois ».
« C’est important de dire les choses vraies », lance Mme Kéké, qui raconte le « mépris », l’« exploitation » et les abus subis par les femmes exerçant son métier. « Moi, ça m’est arrivé qu’un (client) me dise ‘sale nègre, rentre chez toi’« , raconte-t-elle, quand d’autres « te touchent les seins quand tu frappes à leur porte ».
Elle est « une leader de masse », « elle a quelque chose qui magnétise, elle est forte, elle a les mots justes », énumère le député LFI Eric Coquerel, qui a proposé sa candidature dans la septième circonscription du Val-de-Marne, en région parisienne.
Opposée à la candidate de la majorité Roxana Maracineanu, ex-ministre des Sports et championne de natation, Rachel Kéké a finalement réussi à tirer son épingle du jeu malgré un profil peu commun parmi les candidats, et sera la première femme de chambre à siéger à l’Assemblée nationale.