Longtemps considéré comme parti faiseur de roi pour avoir été décisif lors des deux alternances politiques, l’AFP avec la retraite de Moustapha Niasse, semble condamner à une mort politique certaine
Le président de l’Assemblée nationale, Moustapha Niasse, a fait ses adieux aux députés hier, jeudi 30 juin, à l’occasion de la séance de clôture de la session ordinaire 2021-2022. Après avoir passé 10 ans à la tête de l’institution parlementaire, le leader de l’Alliance des forces de progrès (Afp) prend ainsi sa retraite après une brillante et longue carrière administrative et politique au service du peuple sénégalais. Ce départ risque toutefois de plomber, voire précipiter la fin de son parti politique, lancé le 16 juin 1999 et en décadence depuis quelques années. Portée sur les fonts baptismaux, le 16 juin 1999, par le désormais ancien président de l’Assemblée nationale, Moustapha Niasse, l’Alliance des forces de progrès (Afp) a soufflé le jeudi 16 juin 2022, sa vingtaine-troisième bougie dans un contexte très particulier. En effet, longtemps considéré comme parti « faiseur de roi » pour avoir été décisif lors des deux alternances politiques, l’Afp avec la retraite de son leader semble condamner à une mort politique certaine.
L’Alliance des forces de progrès (Afp) a soufflé le jeudi 16 juin 2022, sa vingtaine troisième bougie. Lancée le 16 juin 1999 par l’ancien ministre des Affaires étrangères et responsable du Parti socialiste, Moustapha Niasse, non moins désormais ancien président de l’Assemblée nationale à travers son fameux appel intitulé « Je suis prêt », l’Afp a marqué l’histoire politique du Sénégal ces deux dernières décennies. En 2000 et comme en 2012, l’Afp a été très décisive lors des deux alternances politiques au Sénégal faisant ainsi de son leader charismatique, Moustapha Niasse, un faiseur de roi incontesté à deux reprises. Seulement, depuis l’avènement du régime actuel, Moustapha Niasse et l’Afp semblent perdre de plus en plus l’espoir qu’ils incarnaient aux yeux de beaucoup de Sénégalais.
En effet, sur le plan politique, l’Afp se distingue par une perte de vitesse en termes de représentativité à tous les niveaux nonobstant la position stratégique que son leader, Moustapha Niasse, a incarnée en tant que président de l’Assemblée nationale et deuxième personnalité de l’Etat après le président de la République, ces dix dernières années. De 2012 à nos jours, l’Afp a enregistré le départ de plusieurs de ses cadres qui ont quitté le navire emportant dans leurs bagages militants et bases politiques pour fonder leur propre formation. Il en est ainsi, entre autres, de Serigne Mamoune Niasse, Me Massokhna Kane, Mor Dieng, Me Abdoulaye Babou, Abdou Khadre Ndiaye, Hélène Tine et Malick Gakou pour ne citer que ceux-là.
De parti faiseur de roi à « parti cabine téléphonique »
Aujourd’hui, la conséquence de ces départs se traduit, au niveau national par une léthargie du Secrétariat politique dont les activités se résument dorénavant à des communiqués de presse. Au niveau des différentes localités à l’intérieur du pays, seule une poignée de responsables s’efforce encore à tenir désespérément le flambeau de l’espoir qu’incarnait le fameux « appel du 16 juin ». À l’Assemblée nationale par exemple, le parti de Moustapha Niasse qui comptait lors de sa participation aux élections législatives, sous sa propre bannière en 2001, 11 députés ; ce que lui avait d’ailleurs permis de former un groupe parlementaire confortant ainsi sa position de troisième force politique après le Parti démocratique sénégalais (au pouvoir) et le Parti socialiste (opposition), a vu son quota s’effondrer sous l’actuelle législature.
De 12 sièges sur les 119 remportés par la nouvelle majorité au pouvoir Benno bokk yakaar (Bby), Moustapha Niasse ne s’est vu attribuer lors des dernières législatives que 6 sièges. Soit 04 sièges de plus que son ancien numéro 2 Malick Gakou, qu’il a fait exclure du parti dans la foulée du Bureau politique du 10 mars 2014 lors duquel Niasse a décidé que l’Afp ne présentera pas de candidat à la présidentielle qui devait se tenir en 2017 avant d’être reporté en 2019. L’Afp soutiendra le Président Macky Sall pour un second mandat. Dans le gouvernement, le parti ne contrôle qu’un ministère sur les 2 qu’il avait lors du précédent gouvernement et ce, au moment où, le Parti socialiste a gardé ses deux portefeuilles.
La régression jusque dans l’hémicycle
C’est un secret de polichinelle, la retraite actée hier, jeudi 30 juin, du président Moustapha Niasse à la tête de l’Assemblée nationale ne va qu’empirer la situation décadente de sa formation politique, l’Afp au sein de la coalition Benno Bokk Yakaar. Avec un effectif de 6 députés dans la législature sortante, l’Afp pourrait se retrouver avec moins de cinq sièges lors de la quatorzième législature. Pour preuve, sur la liste nationale (proportionnelle de la coalition majoritaire Benno, la formation politique de Moustapha Niasse ne compte que deux candidats investis à la 19ème place (Aminata Dia) et à la 24ème place (Dr Malick Diop, porte-parole du parti). A ces deux investis, s’ajoutent trois autres responsables candidats retenus pour le scrutin majoritaire départemental à l’intérieur du pays dont l’un est sur la liste des suppléants de Dakar.
Une retraite plombée par l’absence de structuration de l’Afp
Admis à faire valoir ses droits à la retraite après une brillante et longue carrière administrative et politique au service du peuple sénégalais, le président Moustapha Niasse qui a officiellement quitté sa fonction de président de l’Assemblée nationale du Sénégal hier, jeudi 30 juin risque de ne pas profiter pleinement et tranquillement de ce temps de repos bien mérité. Et pour cause, le Président Niasse qui a opté pour un système de management exclusif de l’Alliance des forces de progrès (Afp) depuis l’éviction de l’actuel leader du Grand parti, Malick Gakou, de son poste de numéro 2 est aujourd’hui obligé de rester aux commandes de ce parti. Seule constance mais aussi principal bailleur de l’Alliance des forces de progrès, le Président Niasse incarne aujourd’hui à la fois l’âme, l’esprit et le corps de l’Afp. Il est la seule constance devant tous les autres responsables qui ne sont que des variables.