Après l’audience, le gouverneur général a tenté de lui remettre des sacs qui contenaient de l’argent en guise de remboursement de ses frais de voyage, mais Serigne Touba avait dit dit à ceux qui l’accompagnaient lors de l’audience : que l’argent ne me suive pas. C’est ainsi qu’il partit dans la maison de Jean Thiam où il est resté durant tout son séjour à Dakar.
Pendant ce séjour, Jean Thiam lui demanda la même faveur que celle qu’il avait accordée à Doudou Seck Ben Al Moqdad quand il avait assuré le rôle d’interprète entre lui et le lieutenant gouverneur de la Mauritanie où Serigne Touba avait été déportée entre 1903 et 1907. En effet, le jour de l’audience, le lieutenant gouverneur qui interrogeait Serigne Touba à Saint-Louis s’adressait méchamment à Serigne Touba, mais Doudou Seck atténuait le contenu des paroles de ce dernier lorsqu’il les transmettait à ce dernier. Serigne Touba répondait à la dimension du ton du lieutenant gouverneur, mais Doudou Seck lorsqu’il s’adressait à ce dernier, il n’utilisait pas le même vocabulaire que Serigne Touba. Il faisait tout pour calmer le jeu afin que la situation ne se dégrade pas. A la fin de la convocation, Serigne Touba dit Doudou Seck Ben Moqdad ceci : j’ai remarqué que lors du face-à-face avec le lieutenant gouverneur, tu ne transmettais pas le contenu de nos discours respectifs, alors pourquoi une telle chose ? Il répondit : c’est parce que je t’aime et je ne veux pas qu’un mal t’arrive. Je connais le degré de cruauté de ce lieutenant gouverneur. Si j’ai agi ainsi, c’est pour te mettre à l’abri. Serigne Touba lui dit : c’est bien. En retour, pour rétribuer ce que tu redoutais sur moi au point d’agir ainsi, je te préserverai de l’interrogatoire des deux anges dans la tombe. Ainsi, Doudou Seck lui demanda : peux-tu l’écrire ? Serigne Touba l’écrivit sur un papier et lui remit.
C’est cette faveur que Jean Thiam demandait à Serigne Touba, mais ce dernier lui répondit : c’était un ordre que Dieu m’avait sur lui. Quant à toi, je ferai ce que Dieu me dira à ton endroit. Car c’est Lui qui m’avait donné l’ordre sur Doudou Seck. C’est ainsi qu’il resta pendant un temps dans la maison de Jean Thiam. A la fin du séjour, il demanda à ce que l’on réunisse tous les cadeaux qu’il avait reçus pendant tout le séjour. Ainsi, il avait reçu au total : 200 000 francs ( à l’époque) , 40 kilos d’or et 300 kg d’habits. Alors, il donna tout à Jean Thiam et lui : c’est cela que Dieu m’a recommandé sur toi.
( Source Serigne Souhaybou Mbacke, racontée par Serigne Moustapha Saliou fils de Serigne Saliou Mbacké, traduction M.Moustapha Diop)