Monsieur le Président de l’Assemblée nationale,
Monsieur le Premier Ministre,
Madame la Présidente du Haut Conseil des Collectivités territoriales,
Monsieur le Président du Conseil économique social et environnemental,
Madame la Présidente du haut Conseil du dialogue social,
- le Haut Représentant du Président de la République,
Mesdames, messieurs les leaders de partis et coalitions de partis politiques,
Mesdames, messieurs les représentants du patronat, des centrales syndicales et de la société civile,
Chères autorités religieuses et coutumières,
Mesdames, messieurs en vos rangs, titres et qualités,
Mes chers compatriotes d’ici et de la diaspora,
Je souhaite d’abord vous remercier toutes et tous, mesdames, messieurs, d’avoir bien voulu répondre à mon appel à ce dialogue national ; appel que j’avais lancé dans mon message à la nation, à l’occasion de la fête de l’indépendance, et que j’ai réitéré le jour de la Korité.
Cette rencontre n’est pas une première, parce que le diisso fait partie de notre identité socio culturelle.
C’est pourquoi j’ai érigé le dialogue en principe de gouvernance qui, transcendant le face à face pouvoir-opposition, intègre toutes les forces vives de la nation ; parce que la vie nationale ne peut être monopolisée par les seuls antagonismes politiques, au détriment d’autres priorités d’intérêt commun.
Voilà pourquoi nos concertations nationales antérieures ont porté sur des domaines variés comme :
- l’avenir de l’Enseignement supérieur ;
- la réforme des Institutions, à l’origine du référendum constitutionnel de mars 2016 qui a conféré à l’Assemblée nationale les nouvelles prérogatives d’évaluation des politiques publiques, et la désignation de deux (2) membres du Conseil Constitutionnel par le Président l’Assemblée nationale ;
- les Collectivités territoriales (ce qui a abouti à l’Acte 3 de la décentralisation) ;
- le dialogue politique, qui a permis la réforme du Code électoral, dont l’élection des maires et des présidents de conseil départemental au suffrage universel direct constituent deux innovations majeures ;
- le dialogue social, qui a donné naissance au Haut Conseil du dialogue social et aux conférences sociales ;
- et tout récemment les concertations nationales sur la lutte contre la vie chère.
C’est dans le même esprit que j’ai instauré le 28 mai comme Journée du dialogue national.
Aujourd’hui, mes chers compatriotes, le besoin de concertation est encore plus pressant, alors que le monde entier continue de subir les conséquences cumulées de la pandémie COVID-19 et d’une guerre majeure, dont personne ne peut prédire ni l’étendue, ni la fin.
S’y ajoutent pour nous, la menace immédiate liée à l’avancée du terrorisme dans le sahel, qui a fini d’atteindre des pays jusque-là épargnés.
En outre, l’échéance électorale présidentielle de février 2024 s’impose d’elle-même comme sujet de dialogue.
Je voudrais dire ici que le gouvernement prendra toutes les dispositions nécessaires pour organiser une élection paisible, démocratique, libre et transparente, comme notre pays sait si bien le faire ; y compris en janvier et juillet 2022.
Je n’oublie pas le défi de la jeunesse, de la formation, de l’emploi et de l’entreprenariat. Nous avons beaucoup fait dans le cadre d’instruments comme les Centres de formation, la Convention Etat-Employeurs, la DER/FJ, le 3FPT, l’ANPEJ et le Programme XËYU NDAW ÑI.
Mais il reste évidemment beaucoup à faire pour améliorer l’employabilité des jeunes et vaincre le chômage.
Autre défi qui mérite concertation : l’exploitation prochaine de nos ressources gazières et pétrolières.
Toutes ces questions nous interpellent en tant que nation, au-delà de nos différences et de nos divergences.
Il est donc de notre devoir de nous retrouver pour délibérer sur nos affaires communes, dans le respect de nos acquis démocratiques, le respect des règles qui fondent la nation sénégalaise, l’Etat de droit, la République et ses Institutions, le respect de notre Justice, le respect de nos Forces de défense et de sécurité, le respect des biens publics et de la propriété privée, le respect de nos confessions religieuses et de leurs guides.
C’est tout cela qui forme notre modèle de société que nous avons la responsabilité individuelle et collective de faire vivre et protéger.
Le régime de liberté que nous avons choisi va de pair avec l’exigence de responsabilité. Il n’y a pas de démocratie sans liberté, comme il ne peut y avoir de liberté sans responsabilité. Toute liberté a comme contrepartie la responsabilité qui en limite les abus.
C’est dire que ce dialogue doit marquer notre engagement individuel et collectif de raviver les valeurs qui fondent notre vivre ensemble dans la paix, la stabilité et l’harmonie sociale.
Adhérer à ces valeurs, c’est bannir la violence physique et verbale, ainsi que les discours haineux et la stigmatisation.
Chaque violence physique, chaque violence verbale, chaque mot de haine, chaque bien privé ou public saccagé, et au-dessus de tout, chaque sénégalais tué laisse une blessure profonde à notre pays, à notre humanité, et à la nation sénégalaise.
Je saisis l’occasion pour renouveler mes condoléances émues aux familles endeuillées, et souhaiter prompt rétablissement aux blessés.
Si besoin en était, je voudrais vous rassurer que l’Etat est et restera debout, pour protéger la nation, la République et ses Institutions.
Ensemble, avec toutes les composantes socio politiques éprises de paix, de stabilité et de cohésion nationale, nous avons le devoir solidaire de défendre notre modèle de société, qui nous ressemble et nous rassemble.
C’est l’une des raisons d’être fondamentales de ce dialogue national.
Il y va de notre intérêt commun. Comme je l’ai rappelé dans mon message du 31 décembre 2022, nous sommes parce que le Sénégal est. Nul ne doit s’imaginer plus grand ou plus fort que cette nation qui nous abrite tous.
Mesdames messieurs,
Ici et maintenant, c’est la nation qui nous parle, car elle exige la paix. C’est chacune et chacun de vous qui parle avec votre Sénégal que vous aimez, car vous prolongerez ici par vos mots, par vos suggestions, par votre respect des valeurs du dialogue, notre aspiration à la paix, à la démocratie et au Sénégal de progrès économique et social qui saura prendre en charge son avenir.
Mesdames, messieurs, distingués participants,
D’autres défis nous interpellent, dont l’exploitation de nos ressources pétrolières, gazières et minières.
L’expérience en Afrique prouve à suffisance que ces ressources suscitent souvent la convoitise, des rivalités géostratégiques et des actes malveillants, allant de la piraterie au sabotage, voire au terrorisme.
Comme gouverner c’est prévoir, nous souhaitons le meilleur en nous préparant au pire.
C’est pourquoi nous avons considérablement renforcé les capacités opérationnelles de nos Forces de défense et de sécurité, afin qu’en tout temps et en tout lieu, elles soient à la hauteur de leur mission de veille sur nos ressources naturelles.
Je tiens à renouveler ici ma ferme détermination pour l’exploitation sécurisée, transparente, inclusive et durable de nos ressources.
Ainsi, selon les dispositions de la Constitution issue du référendum de mars 2016, « Les ressources naturelles appartiennent au peuple. Elles sont utilisées pour l’amélioration de ses conditions de vie. L’exploitation et la gestion des ressources naturelles doivent se faire dans la transparence et de façon à générer une croissance économique, à promouvoir le bien-être de la population en général et à être écologiquement durables ».
En application de cette norme constitutionnelle, le gouvernement a adopté une série de mesures, comprenant :
- la révision de nos Codes minier, pétrolier et gazier, en intégrant les normes de l’Initiative pour la Transparence des Industries extractives à laquelle j’ai fait adhérer notre pays en 2013 ;
- les lois sur le partage des recettes tirées de l’exploitation future des hydrocarbures entre les générations actuelles et futures, et sur le contenu local, pour soutenir la participation du secteur privé national à l’exploitation de nos ressources naturelles ;
- la création d’un registre des bénéficiaires effectifs dans le secteur extractif ;
- et la modification du Code général des impôts pour étendre l’obligation de déclaration des bénéficiaires effectifs à l’ensemble des secteurs de la vie économique au Sénégal.
Au demeurant, nos efforts en matière de gestion transparente des ressources extractives ont été reconnus par l’ITIE. Je ne reviendrai pas ici sur les excellentes appréciations dans l’évaluation d’octobre 2021 du Conseil d’administration de l’ITIE sur le Sénégal.
Dans la même dynamique, nous avons mis en place en 2016 le Comité d’Orientation stratégique du pétrole et du gaz, COS-PETROGAZ, chargé de conseiller le Président de la République et le gouvernement sur toutes les questions liées aux filières pétrolière et gazière.
Je présiderai d’ailleurs prochainement une réunion élargie du COS-PETROGAZ, pour faire le point sur :
- l’état d’avancement des projets pétroliers et gaziers et la stratégie « gas to power », production d’électricité à partir du gaz domestique ;
- le bilan et les perspectives de développement du contenu local dans le secteur des hydrocarbureset des Mines ;
- les résultats, orientations et impacts économiques et sociauxattendus de la politique nationale de gestion des ressources pétrolières et gazières ;
- et la gouvernance des entreprises et agences publiques du secteur de l’énergie.
Je rappelle également que nous avons créé en 2017 l’Institut national du pétrole et du gaz.
L’INPG a formé à ce jour 78 ingénieurs et techniciens déjà opérationnels. Notre objectif est d’élargir le spectre des formations pour intégrer d’autres corps de métiers, y compris des juristes hautement qualifiés dans ce domaine complexe ; parce que si nous voulons maitriser au mieux l’exploitation de nos ressources, il nous faut disposer d’un capital humain diversifié et de qualité.
En outre, à la faveur de la loi sur le contenu local, je souhaite que le secteur privé national investisse davantage dans la chaine de valeurs de la filière gazière et pétrolière afin de créer de nouvelles opportunités d’emplois et d’activités génératrices de revenus pour nos jeunes.
Je veux redire ici la disponibilité constante du gouvernement à échanger sur l’exploitation de nos ressources naturelles sur une base saine, sereine et informée. Aucune question n’est tabou.
De la même manière, en plus des questions politiques et celles spécifiques des ressources naturelles, ce dialogue national pourrait porter sur d’autres sujets, notamment économiques et sociaux.
A l’épreuve de la pandémie COVID-19 et de la guerre en Ukraine, et malgré une conjoncture économique difficile, le gouvernement a pris un ensemble de mesures de soutien aux ménages et aux entreprises ; mesures d’ordre fiscal, subventions des prix de denrées de première nécessité et hausse des salaires, en plus de l’appui aux couches sociales les plus vulnérables à travers les Bourses de sécurité familiale.
L’État a également fait un effort considérable de réduction des dépenses publiques, en particulier sur son train de vie.
Au cours de ce dialogue, nous pouvons échanger sur les voies et moyens de mieux soutenir notre secteur privé, atténuer le coût de la vie et optimiser la dépense publique.
S’agissant du format du dialogue, tirant parti de l’expérience passée, nous pourrions reconduire les mêmes Commissions, à savoir :
- politique ;
- économique et sociale ;
- cadre de vie et environnement;
- paix et sécurité ;
- ressources naturelles ;
- bonne gouvernance et lutte contre la corruption ;
- administration, décentralisation et territorialisation des politiques publiques ;
- enfin, Commission de synthèse.
Sur le volet dialogue politique, je vous recommande de mener les concertations de façon à consolider nos acquis démocratiques par de nouveaux consensus sur le Code électoral, le processus électoral et les droits civiques et politiques.
J’ai désigné mon Haut Représentant, Monsieur Moustapha Niasse, ancien Président de l’Assemblée nationale, pour me représenter au dialogue et en assurer la conduite si vous en convenez.
S’agissant de sa structuration, je souhaite qu’elle soit inclusive, en intégrant aux blocs composés de la majorité présidentielle, de l’opposition et des non-alignés, les représentants des guides religieux et coutumiers, ainsi que ceux de la société civile.
Je resterai, pour ma part, attentif à vos conclusions.
Encore une fois, je vous remercie pour le temps et les efforts appréciables que vous allez consacrer à ces assises.
C’est une grande cause, plus grande que chacun de nous ; parce qu’elle est nationale, qu’elle nous engage toutes et tous, et fait de chacun de nous un acteur indispensable de notre réussite collective.
Je suis confiant que nous pouvons y arriver, si nous puisons dans la sagesse de nos anciens et le génie créateur de notre peuple.
Je vous y encourage vivement et souhaite plein succès aux travaux du dialogue national. »