Grand entretien. L’ancien président de la République juge sévèrement les annonces d’Emmanuel Macron et les premiers pas du gouvernement Attal. Il préconise un réarmement politique.
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L’Express : Emmanuel Macron qui nomme Gabriel Attal, est-ce François Mitterrand qui nomme Laurent Fabius ?
François Hollande : Il y a sans doute une volonté, qui était aussi celle de Mitterrand, de donner à une nouvelle génération la place qu’elle peut espérer. Mais Mitterrand n’avait alors pas l’âge d’Emmanuel Macron. Il cherchait à mêler les compétences et les parcours. L’âge ne signe pas une politique, il signale un état civil. Je relève un contraste saisissant entre la jeunesse de l’exécutif et la vieillesse de sa politique, au sens où elle prend ses appuis sur les fondamentaux de la droite classique, vieille sur le plan économique quand elle n’est pas capable d’intégrer le changement climatique et les transitions qu’il appelle, vieille dans les mots, les attitudes, les expressions.
A quoi sert-il de changer un Premier ministre ?
Il existe des moments pour le faire. Après un scrutin, par exemple. Nous ne sommes pas dans ce cas de figure. Le changement de Premier ministre peut aussi correspondre à une nouvelle étape du quinquennat. Or, nous ne sommes pas non plus dans cette perspective. Aucune grande réforme n’est annoncée, aucun acte institutionnel posé, aucun virage budgétaire amorcé, aucune alliance conclue. Ce changement de gouvernement donne-t-il plus de stabilité ? Non, la majorité est toujours relative. Plus de confiance ? Non, les Français expriment la même attitude par rapport au pouvoir. Plus de vision ? Non, la conférence de presse d’Emmanuel Macron n’a été l’occasion que de présenter quelques mesures déjà présentées par l’équipe précédente. Nous avons simplement assisté à un changement d’incarnation : un jeune a remplacé une femme.
Emmanuel Macron, dont on sait d’où il vient, est-il en train de réussir ce que l’on pensait impossible, la synthèse entre François Hollande et Nicolas Sarkozy ?
Je vois bien le sarkozysme, mais je ne vois pas le hollandisme ! Je vois même l’effacement des dernières traces, je dirai même que c’est bien l’intention, des derniers stigmates, du hollandisme.