Pr Djiby Diakhaté, Sociologue sur le débat sur les LGBT: “Nous sommes en train de tomber dans le piège de la banalisation de la question”

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Djiby Diakhaté © Malick MBOW

Maître de conférence à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, Djiby Diakhaté est un sociologue et formateur qui a de de solides compétences sur des questions relatives à la famille et l’Éducation. Dans cette interview, il se prononce sur le débat en cours dans le pays et relatif aux LGBT. A l’en croire, nous faisons fausse en déployant autant d’énergie dans un débat qui semble être l’agenda de l’extérieur. Nous tombons dans le piège de ceux qui veulent que le débat soit posé, pense Djiby Diakhaté. In extenso, l’intégralité de son message, publiée par le journal Point Actu.

 

Rédigé par leral.net le Mardi 21 Mai 2024

 

Pr Djiby Diakhaté, Sociologue sur le débat sur les LGBT: “Nous sommes en train de tomber dans le piège de la banalisation de la question”

“Je crois que ces réactions notées de la part d’une partie du public renvoie plus à des rapports liant des acteurs à des images. En réalité, lorsque Jean Luc Mélenchon a fait l’objet d’applaudissements, c’est parce que précisément il réfère à une proximité avec ceux-là au pouvoir aujourd’hui, et qui font incarner à beaucoup de jeunes un grand espoir. En réalité c’est de cela qu’il s’agit.

En faisant bénéficier à Mélenchon de ces salves d’applaudissements, ces jeunes-là étaient en train, dans une certaine mesure, d’exprimer un espoir. C’est moins Mélenchon qui est important que le symbole de l’espoir qu’il véhicule en défendant une proximité avec le PASTEF et le PROJET. Il s’agit donc de cette image-là. Et de la même manière, le recteur a fait l’objet de huées de la part d’une partie du public, c’est aussi quelque chose qui renvoie à une image, celle d’un régime sortant ayant fait l’objet d’une sanction par une bonne partie de la jeunesse. Ici, c’est plus le régime qui est ciblé que le recteur en tant que tel.

La personne du recteur est rattachée à celle du régime sortant qui a fait l’objet de rejet d’une bonne partie de la jeunesse estudiantine. A mon avis, les porteurs du combat des LGBT sont en train de réussir leur pari. Ce pari c’est précisément de créer le débat. Nous sommes en train, aujourd’hui, sans nous en rendre compte, de débattre d’une problématique que nous risquons à force d’en parler de façon itérative de banaliser aux yeux d’une bonne partie du public sénégalais.

Au fond, lorsque Obama et Mélenchon soulèvent la même question, c’est que précisément leur objectif est de créer le débat, le susciter, de faire en sorte qu’on en parle de façon massive dans le pays. A partir de ce moment-là, leur objectif est atteint., c’est arriver à une sorte de banalisation de la question. Nous sommes en train de tomber dans le piège de la banalisation de la question en mobilisant trop d’énergie autour de ces déclarations alors que nous devons nous concentrer autour de notre projet de société.

Quel type de société nous voulons construire, quel type de Sénégalais voulons-nous fabriquer, Quel type de jeunesse voulons-nous former de manière à nous assurer que nous allons léguer le flambeau de la grandeur de notre pays à des jeunes qui vons poursuivre l’itinéraire ? C’est cela qui devrait nous préoccuper.

Autrement, nous pouvons considérer que ceux qui ont introduit le débat sur les LGBT ont réussi leur mission. En vérité nous sommes en train de nous tromper de combat. Le combat, aujourd’hui n’est pas de plaire aux autres, c’est d’être correct avec eux en restant fermes sur nos principes, nos idéaux et la défense de notre identité. L’idée n’est pas de s’enfermer sur soi, c’est d’être ouvert, d’avoir le courage d’aller à la rencontre des autres, en s’assurant qu’on est adossé sur des valeurs fortes nous mettant à l’abri de toute formes de déviances ou de dérives.

A partir de ce moment, nous devons nous concentrer sur nos cultures locales, notre projet de société. C’est un travail important consistant à accorder à notre culture sa place dans la formation de nos populations. Il s’agit alors de se convaincre que la culture est le fondement. Si nous réussissons à mettre en place une excellente politique culturelle, à défendre nos valeurs compétitives et positives, nous aurons un positionnement de groupe qui contribue à la construction de ce que Senghor avait appelé “La civilisation de l’universel”. Nous avons aujourd’hui à construire une société, à fabriquer notre développement par nous-mêmes. Cela suppose que les véritables problématiques soient soulevées par nous et qu’elles soient orientées vers nos préoccupations de progrès et de bien-être.”

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