«Nous sommes dans un système politique hyperpolarisé, dans lequel les électeurs se concentrent sur ce qu’ils rejettent, ils votent contre le candidat qu’ils aiment le moins pas pour celui qu’ils soutiennent», explique ainsi le chercheur en sciences politiques Nicholas Higgins, de l’Université North Greenville. «Dans la mesure où les accusations étaient déjà largement connues et présentées par le camp de l’ancien président comme un procès politique, peu d’électeurs estimeront donc s’être trompés» après ce verdict, a-t-il ajouté.
Il ne faut pas s’attendre à une bascule vers Joe Biden. »
Nicholas Higgins, chercheur en sciences politiques à l’Université North Greenville
Donald Trump, 78 ans en juin, est le premier ex-président américain reconnu coupable au pénal. Mais il est aussi le premier condamné à être candidat à la présidentielle pour un des deux grands partis, donnant des angles supplémentaires d’attaque pour la campagne démocrate. Malgré les révélations – impliquant sexe, argent et scandales – le procès n’a jusqu’ici pas eu d’impact sur les sondages, laissant Donald Trump et Joe Biden, au coude-à-coude, mais avec une légère avance pour le candidat républicain dans les Etats-clés.
Un sondage de l’institut Marist soulignait qu’une condamnation n’aurait que peu d’effet pour les deux tiers des personnes interrogées. Nicholas Higgins chiffre à environ 1% la proportion d’électeurs qui pourraient désormais voter pour un troisième candidat, ou ne pas se rendre aux urnes «mais il ne faut pas s’attendre à une bascule vers Joe Biden» à cause du verdict. Un autre sondage, de YouGov pour Yahoo! News a en outre souligné l’intérêt très relatif des Américains pour ce procès: 31% des personnes interrogées disaient s’ennuyer en le suivant alors que seules 26% le trouvaient intéressant. Plus encore, la moitié seulement considéraient que la falsification de comptes pour masquer des paiements était un crime majeur.
Je pense que l’impact sera négatif et pourrait lui coûter l’élection. »
Jared Carter, professeur à l’école de droit du Vermont
D’autres spécialistes estiment cependant que même une baisse à la marge des votes en faveur de Donald Trump pourrait avoir un impact majeur dans les six ou sept États où l’élection sera véritablement décidée. «Cela se jouera à quelques milliers de voix dans ces États, une condamnation va certainement lui faire du mal», anticipe ainsi Donald Nieman, professeur d’histoire à l’Université de Binghamton. Par ailleurs, ce verdict pourrait renforcer le noyau de soutiens à Donald Trump mais éloigner les électeurs indépendants, pense Jared Carter, professeur à l’école de droit du Vermont. «Et dans un scrutin serré dans quelques États, ces électeurs indépendants, sans doute républicains modérés, feront une grosse différence.» «Si on fait le bilan, au-delà de l’agitation, des gros titres et du soutien de sa base électorale, je pense que l’impact sera négatif et pourrait lui coûter l’élection», a-t-il ajouté.
Professeur à l’école de droit d’Albany, Ray Brescia souligne par ailleurs que l’impact de ce procès pourrait être renforcé par le fait qu’il pourrait être le seul, parmi les différentes poursuites visant le candidat républicain, à parvenir à une conclusion avant les élections. «Déterminer combien d’électeurs se détourneront de M. Trump est difficile à dire, mais même une petite variation pourrait avoir d’énormes conséquences», explique-t-il à l’AFP.