Du sucre à l’hôtellerie de luxe, Jean Claude Mimran reste l’un des hommes d’affaires ouest-africain les plus énigmatiques. Cette personnalité du monde du business est réputée pour sa discrétion et sa puissance. Portrait.
A 72 ans aujourd’hui, l’homme a une vie remplie. Il a débarqué au Sénégal en 1972 pour aider son père qui montait alors la Compagnie sucrière du Sénégal (Css). Trois ans plus tard, ce papa, proche de Houphouet Boigny et de Senghor, décède en lui laissant un vaste chantier, Richard-Toll et une usine en plein montage.
«Rapidement, Jean Claude s’impose au sein de ses frères. Il était le cadet de cette famille de trois enfants, mais il a pris les choses en main. Il termine l’usine et lance la production alors qu’il venait juste de boucler ses trente ans ».
En quelques mois, il coordonne l’héritage de son papa, un juif né en Algérie. «Jeune, il hérite avec ses frères des Grands Moulins de Dakar ainsi que ceux d’Abidjan ». Bénéficiant de monopoles en Côte d’Ivoire et au Sénégal, il tient ses business d’une main de fer.
«C’est un homme qui ne se laisse pas faire. Son mérite c’est d’avoir créé des affaires rentables ». Quand lui et son papa arrivaient à Richard-Toll, le village ne comptait qu’une centaine d’habitants. Aujourd’hui, 45 ans après, le petit bourg est devenu une des villes les plus peuplées du Nord et compte plus de 100 000 habitants. «Cette ville est aujourd’hui très liée à Mimran. Il y jouit d’un très grand respect».
Un jour raconte un habitant, il visitait une école dans la ville, «il a trouvé que les jeunes élèves étaient dans la chaleur. Face à cette situation, il a entrepris rapidement des travaux sur place et climatisé toutes les salles de classe et depuis plusieurs années, c’est lui-même qui paie les factures d’électricité». Dans cette ville, il est pratiquement l’unique employeur. Près de 5000 personnes travaillent dans son usine.
«Il fait beaucoup de social». A ce sujet, il y a quelques années irrité par un article du Huffington Post à son sujet, la direction du groupe avait réagi en indiquant que la Compagnie sucrière n’a jamais oublié les populations : « le Groupe Mimran finance intégralement des centaines actions sociales notamment dans le domaine de la santé (en permettant un accès aux soins à plus de 70.000 personnes), assure l’irrigation gratuite de 500 ha de terres pour les riziculteurs, la distribution d’eau potable aux populations de nombreux villages isolés, les réalisations de nombreux forages pour la construction des puits, la création et l’alimentation de centaines d’étangs, permettant au bétail de s’abreuver, les dons de fourrage aux éleveurs (nous tenons la liste de l’ensemble de ces actions à votre disposition) », précisait un démenti en l’endroit du site.
Dans ce cadre d’ailleurs, il y a quelques jours, la fondation Marie Louise Mimran, a inauguré un collège à Ndiagué Diaw, un village du département de Richard-Toll. Une école entièrement financée par les Mimran.
Classé parmi les 50 fortunes françaises avec un patrimoine estimé à plus de 1000 milliards, l’homme dit qu’il ne réside plus en France. «C’est à Gstaad en Suisse où il réside désormais la plupart du temps ». Ici, il a construit un hôtel de luxe, Alpina, et y a investi plus de 160 milliards. La nuitée y coûte plus de 650 000 francs CFA. Une diversification que l’homme a tenté depuis longtemps.
« Les Mimran avait acheté la firme Lamborghini à 3 millions d’euros avant de le revendre à Chrysler pour 22 millions d’euros ». Une bonne affaire au finish. Tout comme, il était entré dans la banque au Sénégal en reprenant la CBAO qu’il a revendu à près de 75 milliards aux Marocains de Attijari.
Depuis quelque temps, on prête à Jean Claude Mimran l’intention de vouloir vendre ses actifs en Afrique. L’intéressé a démenti à plusieurs reprises. Mais le groupe marocain aurait fait une offre de 650 milliards. Yariv Elbaz, ce gestionnaire du Fonds d’investissement, Ycap serait entré en discussion depuis plusieurs mois avec Mimran, mais les deux parties n’ont pas encore trouvé de solution.
S’il y arrive, Jean Claude Mimran va lui céder la CSS et ses deux grandes minoteries en Afrique de l’Ouest, un groupe qui réalise un chiffre d’affaire de plus de 300 milliards entre la Côte d’Ivoire et le Sénégal. «Les discussions autour de la vente existent maintenant, Jean Claude tient beaucoup à ses bijoux de famille, ce sera difficile pour lui de vendre, même si l’OPA est assez intéressante ».
En attendant, le groupe comme le soulignait Jeune Afrique, s’est déjà diversifié dans des activités moins connues. « De l’autre côté de la Méditerranée, il développe ses trois sociétés monégasques : Eurafrique (négoce de matières premières agricoles), Cavpa (import-export) et Sometra (transport), dont ni les résultats ni le poids dans le groupe ne sont connus », indiquait le journal panafricain.
Depuis plusieurs mois également, il est entré dans les mines de phosphates avec la mine de Gadde Bissik où il détient 20% auprès d’autres investisseurs.
Il est également présent dans l’or avec 14 % des actions de Teranga Gold. Ses affaires au Sénégal et dans le monde sont surveillées comme du lait sur le feu par Mamadou Diagna Ndiaye.
Ce banquier, très influent, est avec les enfants de Mimran au coeur de la gestion des affaires de Jean Claude. «C’est un homme de réseaux, très respecté dans beaucoup de milieux d’affaires et politiques». Ce chevalier de la Légion D’honneur française entretient les meilleures relations avec le Président Ouattara. Il est également un confident du Président Macky Sall.
Jean Claude Mimran est donc un personnage bien entouré et depuis plusieurs années, ses enfants sont également impliqués dans la gestion du groupe. Son fils David est très présent dans la gestion de Mimran Schur Picturs, qui produit des films aux Etats Unis.
De même, le groupe est présent dans le capital d’une société d’investissements située sur le sol américain. De même, il est actionnaire de Surrey New York dans l’hôtellerie de luxe.
source : Leral