Migrant, un temps sans-abri et désormais étoile montante des MMA, le Camerounais Francis Ngannou joue ce samedi 20 janvier 2018 à Boston, sa première chance pour un titre chez les lourds dans la plus prestigieuse des ligues, l’Ultimate Fighting Championship (UFC) américaine.
Face au champion en titre, l’Américain Stipe Miocic, le combattant de 31 ans est donné favori, quatre ans après ses débuts dans ce sport de combat extrême (qui associe plusieurs disciplines et permet coups de pied, poing, genou, coude et passages au sol), dont deux au sein de l’UFC.
Avant de se convertir aux MMA, c’est de boxe anglaise dont Ngannou rêvait. Ce rêve et l’absence de perspectives dans son pays d’origine, l’ont poussé à prendre les chemins de l’exil, vers Paris, en 2013, quitte à vivre d’abord dans la rue.
« Du Cameroun à la France, c’est l’histoire d’un jeune qui n’a pas eu beaucoup de chance dans la vie mais qui ne s’est pas résigné, qui s’est permis de rêver« , résume-t-il. « Je combats contre un sort qui m’était destiné, une situation à laquelle j’étais condamné. »
Assis sur un tatami de la MMA Factory, dans le 12e arrondissement, en avril dernier, le colosse (1m93, 113 kg) raconte le divorce de ses parents quand il avait six ans, les années balloté chez les proches qui acceptent de l’accueillir, les étés à travailler dans des carrières de sable pour payer ses courtes études, les petits jobs à l’âge adulte…
« A un moment, j’ai décidé de ne plus être la victime de la vie, de ne plus subir mais de faire face, de combattre, et j’ai pris des initiatives, poursuit le natif de Batié (ouest du Cameroun). Quand je suis arrivé en France, c’était l’occasion tant rêvée de me réaliser« .
La voix est douce, posée, l’homme calme, mesuré. Bien loin de l’image que l’on se fait du combattant de MMA, particulièrement quand il a ce gabarit, le surnom de « prédateur » et une prédilection pour les victoires expéditives (7 sur 11 dans le premier round, pour une seule défaite).
« Francis est ultra-agressif. Au-delà de gagner des combats, il les gagne de la façon la plus spectaculaire possible« , commente l’ancien combattant devenu entraîneur Fernand Lopez Owonyebe.
C’est lui qui a convaincu Ngannou de s’essayer aux MMA, quand celui-ci, à peine arrivé à Paris, les poches presque vides et sans personne pour l’accueillir, écumait les salles afin de réaliser son rêve de devenir champion du monde de boxe.
« La nature lui a donné un héritage génétique qui fait que, physiquement, il est blindé« , ajoute le mentor, qui a laissé son poulain partir s’entraîner sans lui aux Etats-Unis, l’an dernier. « Pour un poids lourd, il est au-dessus de toutes les courbes pour toutes les qualités physiques: force, vitesse, endurance, coordination, rapidité, souplesse, il a tout. »
Le mental également. « Il a traversé certaines choses qui murissent un homme de manière anticipée, estime Owonyebe. Les difficultés deviennent pour lui un passe-temps parce que c’est beaucoup plus simple que ça qu’il a vécu. »
Ngannou « rêve grand« , ne manque pas de confiance en lui et assume la dose d’orgueil qui fait les champions.
Si cet admirateur de Mike Tyson a finalement délaissé la boxe, c’est en grande partie parce qu’il a perdu son deuxième combat de MMA. « Il était hors de question que j’arrête sur une défaite« , explique-t-il.
L’objectif, lui, est resté le même: « devenir N.1 en sport de combat » pour enfin « clore le chapitre difficile de (son) enfance, de (son) adolescence« .