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« L’heure est venue de ramener les troupes américaines à la maison », doit annoncer le président américain, selon des extraits distribués aux médias de son discours très attendu.
Joe Biden doit confirmer mercredi que « l’heure est venue de mettre fin à la plus longue guerre de l’Amérique » en retirant toutes les troupes américaines d’Afghanistan d’ici le 20e anniversaire des attentats du 11 septembre 2001, qui avaient provoqué l’intervention des Etats-Unis. « L’heure est venue de ramener les troupes américaines à la maison », doit-il marteler, selon des extraits distribués aux médias de son discours très attendu.
« Je suis le quatrième président américain à gérer la présence militaire américaine en Afghanistan », « je ne transmettrai pas cette responsabilité à un cinquième », doit-il prévenir, en jugeant vain d’attendre « de créer les conditions idéales pour un retrait ». Le président afghan Ashraf Ghani a dit « respecter » cette décision, dont il a discuté au téléphone avec son homologue américain. Les forces de sécurité afghanes « sont pleinement capables de défendre leur peuple et leur pays », a-t-il insisté dans un tweet.
Malgré les craintes croissantes d’une victoire des talibans et du retour d’un avatar du régime fondamentaliste qu’ils avaient imposé de 1996 à 2001 à Kaboul, Washington a décidé de quitter le pays « sans conditions », en coordination avec les autres pays de la coalition internationale. « Nous avons atteint les objectifs que nous nous étions fixés », a assuré mercredi le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken, à Bruxelles pour afficher la plus grande concertation avec les alliés de l’Otan.
La ministre allemande de la Défense Annegret Kramp-Karrenbauer a confirmé que les contingents des pays de l’Alliance atlantique quitteraient « ensemble » le territoire afghan. Mardi, après des semaines de consultations, un haut responsable américain avait fait savoir que le 46e président des Etats-Unis avait tranché. « Nous allons entamer un retrait ordonné des forces restantes avant le 1er mai et prévoyons d’avoir sorti toutes les troupes américaines du pays avant le 20e anniversaire du 11-Septembre », avait-il annoncé.
La menace talibane
Joe Biden repousse ainsi de moins de cinq mois la date butoir du 1er mai, prévue pour ce retrait total dans l’accord historique conclu en février 2020 par son prédécesseur Donald Trump avec les talibans. « Si l’accord est violé et les forces étrangères ne quittent pas notre pays à la date prévue », « il y aura sûrement des problèmes et ceux qui ne respectent pas l’accord seront tenus pour responsables », a mis en garde mercredi le porte-parole des talibans Zabihullah Mujahid.
La veille, les insurgés avaient prévenu qu’ils refuseraient, « tant que toutes les forces étrangères n’auront pas achevé leur retrait », de participer à la conférence sur la paix en Afghanistan que la Turquie, l’ONU et le Qatar doivent organiser du 24 avril au 4 mai à Istanbul. La Russie a d’ailleurs dit redouter « une possible escalade » qui « pourrait saper les efforts » de paix.
Malgré l’accord américano-taliban de 2020, la violence demeure à un niveau très élevé entre les insurgés et les forces afghanes. Et le renseignement américain a estimé, dans un rapport paru mardi, que les autorités de Kaboul allaient « peiner à résister » en cas de départ de la coalition internationale. « Nous continuerons à soutenir le gouvernement afghan » mais « nous n’allons pas rester engagés militairement en Afghanistan », doit déclarer Joe Biden dans son discours. Sa porte-parole Jen Psaki a appelé les talibans à « tenir leurs engagements » et à « ne pas laisser l’Afghanistan devenir un Etat paria ».
Les Etats-Unis sont intervenus en Afghanistan il y a près de 20 ans, dans la foulée des attentats contre les tours jumelles de New York et le Pentagone. Ils ont chassé du pouvoir à Kaboul les talibans, accusés d’avoir accueilli Oussama ben Laden et sa nébuleuse jihadiste Al-Qaïda responsable des attentats, mais se sont ensuite enlisés dans le pays instable. Au plus fort de leur présence, en 2010-2011, quelque 100.000 militaires américains étaient déployés en Afghanistan. Mais depuis, le désengagement a été continu, et s’est accéléré à la fin du mandat de Donald Trump: il ne reste plus que 2.500 soldats américains en Afghanistan. Au total, la mission « Resolute Support » de l’Otan implique 9.600 militaires de 36 pays.
Les « guerres sans fin »
Pour tourner la page de ce conflit dans lequel plus de 2.000 Américains et des dizaines de milliers d’Afghans ont été tués, le gouvernement de Donald Trump avait conclu à Doha, au Qatar, un accord historique avec les talibans. Il prévoyait le retrait de toutes les forces américaines et étrangères au 1er mai prochain, à condition que les insurgés empêchent à l’avenir à tout groupe terroriste d’opérer à partir des territoires afghans qu’ils contrôlent.
Le directeur de la CIA William Burns a assuré mercredi qu’après « des années de pression contre-terroriste soutenue », les groupes jihadistes basés en Afghanistan ne représentaient plus la principale menace pour les Etats-Unis. Les talibans devaient aussi entamer des négociations de paix directes inédites avec le gouvernement de Kaboul. Ces pourparlers, qui piétinent depuis leur ouverture en septembre, devaient être relancés par la conférence d’Istanbul. Mais une absence des talibans se traduirait par une nouvelle impasse.
Comme Donald Trump, et à l’unisson d’une opinion américaine de plus en plus lasse des interventions meurtrières et coûteuses à l’autre bout du monde, Joe Biden a promis de « mettre fin aux guerres sans fin » de l’Amérique. La classe politique américaine était divisée face à l’annonce du retrait, qui ne prévoit même plus le petit contingent contre-terroriste dont le président avait initialement envisagé le maintien.
La plupart des démocrates, mais aussi plusieurs ténors trumpistes, ont salué le rapatriement tant attendu des soldats. Mais d’autres, dans les deux camps, ont déploré un départ « prématuré ». « Retirer nos forces d’Afghanistan d’ici le 11 septembre ne fera qu’enhardir les jihadistes qui ont attaqué notre pays 20 ans plus tôt », a protesté la députée républicaine Liz Cheney.