Le cinéma français face aux enjeux du déconfinement

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Alors que la situation sanitaire s’améliore, la France rouvre mercredi ses salles de cinéma, fermées depuis octobre en raison de la pandémie de Covid-19.

Des employés préparent la réouverture du cinéma UGC Ciné Cité Les Halles, à Paris, le 18 mai 2021. © Anne-Christine Poujoulat, AFP
Des employés préparent la réouverture du cinéma UGC Ciné Cité Les Halles, à Paris, le 18 mai 2021. © Anne-Christine Poujoulat, AFP

L’industrie doit désormais rattraper un énorme retard de diffusion tout en composant avec des mesures sanitaires contraignantes.

Le jour J est enfin arrivé pour les exploitants de salles de cinéma. Mercredi 19 mai, alors que la France entame une phase cruciale de son déconfinement, les salles obscures renouent avec le public après huit mois de fermeture. Au total, depuis le début de la crise du Covid-19, les exploitants ont été contraints de maintenir leurs établissements fermés durant 300 jours. Un scénario catastrophe qui représente un manque à gagner pharaonique pour le secteur et qui a occasionné des problèmes logistiques en cascade. Par ailleurs, la réouverture des salles fait l’objet d’un arbitrage compliqué entre les films dont l’exploitation a été interrompue prématurément, les nouvelles grosses productions et les films indépendants.
À cela s’ajoutent des mesures sanitaires draconiennes dont une jauge d’occupation des salles fixée à 35 % et le couvre-feu à 21 h. France 24 fait le point sur les perspectives de reprise du septième art en France.

Baisse historique de la fréquentation

Après plusieurs années de progression, le cinéma français battait en 2019 un nouveau record de fréquentation avec 213 millions de spectateurs et 1,5 milliard de recettes. Une envolée stoppée net par la crise du Covid-19. Selon le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), la fréquentation en salles a connu en 2020 une baisse historique de 70 %.

« Les salles représentent une partie très importante des recettes de l’industrie », explique Marc-Olivier Sebbag, délégué général adjoint de la Fédération nationale des cinémas français (FNCF), contacté par France 24. « Certains secteurs ont certes tiré leur épingle du jeu, comme la VOD, la vidéo et la télévision, mais l’exploitation, qui constitue le cœur des recettes, a été totalement interrompue sur une grande partie de la période. »

Depuis le premier confinement, la crise sanitaire a occasionné un manque à gagner de 1,5 milliard d’euros sur l’exploitation des films, selon les estimations de la FNCF.

Alors que les cinémas ont été contraints de fermer leurs portes durablement, les tournages, interrompus en France du 17 mars au 11 mai 2020 lors du premier confinement, ont pu reprendre rapidement avec des mesures sanitaires renforcées. Quatre-vingt treize longs métrages ont ainsi pu être tournés dans la capitale en 2020, a annoncé la mairie de Paris, soit une baisse de 10 % seulement par rapport à 2019. Selon le CNC, cette diminution atteint 20 % à l’échelle nationale.

Le casse-tête de la diffusion

Si les productions ont été relativement épargnées par la crise du Covid-19, l’enjeu aujourd’hui est de rattraper le retard de diffusion engendré par la fermeture des salles. Pas moins de 30 films sortent simultanément mercredi 19 mai, soit deux fois plus que la moyenne. Des nouveautés, comme « Nomadland » de Chloé Zhao ou « The Father » de Florian Zeller – tous deux récompensés aux Oscars –, mais aussi des films dont l’exploitation a été interrompue par la fermeture des salles, comme le dernier Albert Dupontel, « Adieu les cons » (neuf jours d’exploitation), ou le nouveau film de Maïwenn, « ADN » (un jour seulement).

Lire aussi : « Nomanland » de Chloé Zhao rafle les récompenses les plus prestigieuses aux Oscars

Alors que 450 films seraient en attente de diffusion, la médiatrice du cinéma a appelé « à un engagement fort de solidarité » de la filière pour éviter les tensions. « Un encombrement des écrans sur plusieurs mois est à prévoir », indique-t-elle.

Malgré cela, les discussions entre distributeurs portant sur un calendrier concerté n’ont jusqu’à présent pas porté leurs fruits.

« L’idée était de mettre à plat toutes les sorties programmées et d’éviter les nœuds », explique une source présente aux discussions, contactée par France 24. « Mais les divisions demeurent trop prononcées entre certaines sociétés indépendantes qui craignent que leurs films soient noyés dans la masse et de gros distributeurs qui jugent au contraire que l’abondance de films est primordiale pour faire revenir les spectateurs. »

Les prochaines semaines « capitales »

Maintenue à flot par les aides de l’État, l’industrie cinématographique mise sur une forte fréquentation du public. Une donnée d’autant plus cruciale que les salles doivent respecter un protocole sanitaire draconien, mais aussi le couvre-feu à 21 h, qui réduit drastiquement le nombre de séances.

« Les prochaines semaines vont être capitales car les aides qui ont jusqu’ici permis d’éviter les faillites vont progressivement baisser jusqu’à fin août et doivent être compensées par les spectateurs », souligne Marc-Olivier Sebbag. « Notre seule option dans le contexte actuel est de relancer la machine au mieux, en espérant une sortie de crise rapide. »

Comme le délégué général adjoint de la FNCF,  de nombreux acteurs de l’industrie redoutent un scénario similaire à celui de juin 2020. L’accalmie de la pandémie avait alors permis la réouverture partielle des salles en juillet. Une reprise plus lente que prévue qui avait finalement tourné au fiasco en octobre avec une nouvelle fermeture des cinémas.

Le plan mis en place aujourd’hui par le gouvernement prévoit une reprise progressive de l’activité, avec une hausse de la jauge de fréquentation de 35 à 50 % en juin, dans l’optique d’un retour à la normale en juillet.

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