En conférence de presse ce samedi à Dakar, la procureure sortante à la Cour pénale internationale (Cpi), Fatou Bensouda, a estimé avoir fait un mandat « satisfaisant » au sein de cette juridiction internationale.
« Je pense que le niveau où j’ai trouvé la CPI est aujourd’hui beaucoup plus élevé et je remercie tout le monde, les Etats-parties, l’Afrique et surtout le Sénégal pour le soutien que j’ai eu pendant mon mandat », a d’emblée souligné la magistrate gambienne dont le mandat prend fin le 14 juin prochain.
« Un procureur est élu pour un mandat de neuf ans, j’ai été élu en 2012 jusqu’en 2021, dans quelques jours, ce sera fini. Je pense que j’ai fait un bilan assez positif au regard de tout le travail accompli. Il y a eu vraiment des succès, des défis aussi et des challenges », a-t-elle rappelé devant les journalistes. La magistrate gambienne est d’ailleurs convaincue qu’il fallait beaucoup de dévouement et de motivation pour mener à bien un travail pas facile de procureur à la CPI, estimant que la coopération est importante dans cette mission, en plus d’avoir la posture d’un diplomate pour mener à bien les enquêtes dans les différents pays.
« Dans les défis, le plus dur est relatif aux témoins parce que nous avons la responsabilité de sécuriser les témoins. On a vu dans l’exemple du Kenya, les témoins ont été retrouvés et détournés contre la Cour ce qui a entrainé l’abandon de ce dossier », a-t-elle regretté, donnant ainsi l’exemple du président Uhuru Kenyatta accusé de crimes contre l’humanité après l’élection présidentielle de 2007 occasionnant 1300 morts au pays.
« Tout est fait dans la négociation, car on n’a pas de pouvoir d’oppression. On négocie toujours avec le pays pour les mandats. Si on ouvre une enquête, on va voir avec qui travailler dans le pays concerné. Parfois on n’a point besoin d’assistance, on vient mener nos enquêtes normalement. Le travail est très difficile », a reconnu Madame Bensouda.
Affaire Laurent Gbagbo et Blé Goudé
Interpellée sur le dossier relatif à la crise ivoirienne, la procureure de la CPI déclare ne pas avoir de regret après l’acquittement de Laurent Gbagbo, ancien président de la Côte d’Ivoire, et de Blé Goudé, son co-détenu. Elle déclare : « Je ne faisais que mon travail en tant que procureure dans l’affaire Laurent Gbagbo et Blé Goudé, je n’avais rien de personnel dans ce dossier, c’était mon travail, un sacerdoce à remplir. On a eu beaucoup de difficultés à présenter les preuves et quand on a terminé, les juges les ont jugés insuffisantes ».
Fatou Bensouda précise à cet effet n’avoir attaqué personne sur cette affaire. « Je faisais mon travail, je suis procureur, si je juge que la loi n’a pas été bien dite, j’ai saisi la chambre la plus élevée sur la base des aspects juridiques qui ne m’ont pas convaincue ». Elle dit avoir « une responsabilité en tant que la procureure de laisser une jurisprudence ».
La procureure sortante de la Cpi est par ailleurs revenue au cours de son face-à-face avec les journalistes sénégalais sur les sanctions qui lui ont été infligées par le régime de l’ancien président américain Donald Trump.
« C’était très dur, on a confisqué mon visa. L’administration Trump nous a fatigués, on avait beaucoup de soucis, mais cela ne m’a pas empêchée de faire mon travail. Aujourd’hui, Dieu merci, la nouvelle administration Joe Biden estime que ces sanctions n’avaient pas de sens, qu’un procureur qui fait son travail soit puni » s’est-elle réjouie.
Pour rappel, Fatou Bensouda a été élevée, ce vendredi, au rang de Commandeur dans l’Ordre national du lion à l’issue d’une audience avec le chef de l’Etat sénégalais Macky Sall.