Eric Zemmour : nos révélations sur sa candidature à la présidentielle

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Eric-ZEMMOUR© Malick MBOW

Paris Match ||Mis à jour le 

Emilie Lanez

Arrivée matinale au «Figaro », dans le IXe arrondissement de Paris, le 1er juillet. Sur ses pas, les deux policiers chargés de sa protection.

Arrivée matinale au «Figaro », dans le IXe arrondissement de Paris, le 1er juillet. Sur ses pas, les deux policiers chargés de sa protection.DR

Fort de ses cartons d’audience et malgré des sondages peu encourageants, le polémiste de CNews peaufine son plan de bataille pour l’Élysée. Une stratégie portée par un petit noyau de jeunes militants politiques, de financiers et d’intellectuels. Notre enquête lève le voile sur cette « galaxie Zemmour ». Et sur les motivations profondes d’un personnage devenu une marque.

Bien qu’il veuille encore le taire, et sauf virevolte inopinée, Éric Zemmour sera candidat à l’élection présidentielle. Le nom du parti politique avec lequel il partira en campagne n’est pas arrêté, mais l’expression latine « Vox populi » le séduit. La date de sa déclaration officielle est à l’étude ; quelques proches suggèrent, audacieusement, le 11 novembre. Élément essentiel, un imprimeur a été approché voici trois semaines. Accompagné de sa conseillère, Sarah Knafo, 27 ans, et de l’ancien eurodéputé souverainiste Paul-Marie Coûteaux, 64 ans, Éric Zemmour a déjeuné, mi-juin, avec Gilbert Caron, patron de Roto Presse Numéris, qui fabriqua les affiches et les tracts des campagnes de Nicolas Sarkozy en 2002 et 2007. La machine s’enclenche.

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Conscient de sa faiblesse sur les questions économiques, le journaliste bosse. Loïk Le Floch-Prigent, 77 ans, ancien P-DG d’Elf puis de la SNCF, lui rédige des notes et prodigue des cours intensifs lors de déjeuners en tête à tête. « Il commence à avoir des réflexes ; je n’ai pas fini ma pédagogie mais il apprend bien », confie l’ex-patron mitterrandiste condamné pour de colossaux abus de biens sociaux, enchanté d’enseigner à cet élève à la mémoire phénoménale que le couple franco-allemand n’existe pas et que notre tissu industriel manque de fonds propres. Moins professoral, un autre septuagénaire offre à Zemmour ses réseaux et se dit prêt à aider plus encore : Charles Gave, 77 ans, voix de stentor et biographie militante : « Je suis fils d’officier, intellectuel de la finance, parti à Londres en 1981 pour ne pas vivre sous des ministres communistes. »

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Revenu il y a cinq ans à Paris, ce Gascon a fait fortune dans la gestion d’actifs. Une manne grâce à laquelle il couve l’Institut des libertés, un think thank très à droite, l’Institut de formation politique, une école associative qui « recrute et forme des étudiants courageux pour servir la France », dixit sa plaquette de présentation – sa fille, Emmanuelle Gave, en est la directrice exécutive. Ces écuries, proches de Marion Maréchal, se disposent à prêter main-forte à Éric Zemmour. « Sa campagne ne coûtera pas cher, dit Charles Gave, qui préside aussi le club de rugby Biarritz olympique, on lancera une chaîne YouTube depuis la Russie et on se débarrassera des sangsues, des brigands, de cette haute fonction publique. » Influent mécène de la droite radicale mais hostile à Marine Le Pen, Gave dîne régulièrement avec Zemmour, dont il savoure l’érudition et souligne les origines : « Il arrive du fin fond du Sahara et parle de la France avec les accents de Bernanos. » Enfin, de Bruxelles, où il s’est exilé en 2012 après l’élection de François Hollande, le moins tonitruant Pierre-Edouard Stérin, 47 ans, fondateur du site LaFourchette, inventeur de la Smartbox, approuverait également l’épopée en préparation. Ce père de cinq enfants, qui vient de confier 800 000 euros à une fondation destinée à soutenir des causes « pour le bien commun », apprécie les envolées traditionalistes du journaliste.

Dans l’ombre, une vingtaine de personnes, qui ont décliné tout entretien, voire annulé les rendez-vous convenus, s’affairent

Demeure l’épineuse question des 500 signatures d’élus à obtenir pour avoir le droit d’entrer dans la course à l’Élysée. Logistique complexe pour un groupuscule dépourvu de maillage territorial. Le modeste parti chrétien-démocrate, fondé par Christine Boutin et dirigé par Jean-Frédéric Poisson, pourrait proposer son aide. Quelques émissaires ont en outre cherché conseil auprès d’experts des Républicains, dont le récent directeur de campagne de Valérie Pécresse, le haut fonctionnaire Patrick Stefanini. Tous ont mis en garde ces débutants, pour la plupart passés par les rangs du syndicat étudiant Uni. La chasse aux signatures exige de s’y consacrer en amont, automne prochain dernier carat, et puis, pour battre le rappel, il faut de l’argent et, pour le dépenser, une comptabilité séparée. Si le candidat concourt en avril 2022, le Conseil constitutionnel scrutera ses comptes en remontant jusqu’au 1er juillet 2021. Message compris. En attendant l’inauguration de Vox populi, le « Journal officiel » a publié, le 1er juillet, un avis informant que l’association Les Amis d’Éric Zemmour était agréée par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.

À la marche de soutien aux policiers, le 19 mai, au côté de ses amis, l’ex-RN Jean Messiha (au centre) et Philippe de Villiers. Derrière, l’ancien gilet jaune Benjamin Cauchy
À la marche de soutien aux policiers, le 19 mai, au côté de ses amis, l’ex-RN Jean Messiha (au centre) et Philippe de Villiers. Derrière, l’ancien gilet jaune Benjamin Cauchy© Federico Pestellini / Panoramic / Bestimage

Dans l’ombre, une vingtaine de personnes, qui ont décliné tout entretien, voire annulé les rendez-vous convenus, s’affairent, dopées par le score piteux du RN aux régionales et transportées par le sondage Ifop-Le Point attribuant à leur leader 5,5 % des intentions de vote. Ce score n’est-il pas cinq fois supérieur à celui que leur modèle, Donald Trump, obtenait au début de son aventure ? « La dynamique est la même, jubile Samuel Lafont, 34 ans, ancien artisan du tour de France de Contribuables associés. D’ailleurs, comme l’ancien président des États-Unis, Éric Zemmour a raison sur tout, il est le seul à tenir un discours de vérité, mais lui, en plus, est cultivé. » Le jeune homme, qui remonte sa manche pour exposer les cicatrices gardées d’une agression au couteau – « perpétrée en avril 2013 par trois immigrés, dont un réfugié », précise-t-il –, anime « la mobilisation en ligne ». Instagram, TikTok, Twitter, il surveille chaque heure les connexions favorables, croyant y discerner le pouls d’un engouement croissant. En parallèle, cet expert des réseaux sociaux, passé par la campagne de François Fillon, anime depuis quatre ans le site Internet Damoclès, une machine à faire signer des pétitions (« Non au retour des djihadistes en France », « Expulser les délinquants et criminels étrangers », etc.), en réalité, un aspirateur à data qui engrange des gigaoctets d’adresses électroniques.

Éric Zemmour, éditorialiste politique au « Figaro », sur Paris Première et CNews, s’apprête donc à briguer les suffrages des Français. Une décision mûrie, prise cet hiver et dont il s’est ouvert dès janvier à quelques intimes, dont son épouse, l’avocate Mylène Chichportich, rencontrée quand tous deux avaient 15 ans. Elle préfère ne pas s’exprimer sur l’impitoyable combat qui se profile, sur ce désir fou qui obnubile son mari et l’éloigne si souvent, de plus en plus souvent, du foyer où s’épanouissent leurs trois enfants. « Ses prétendues ambitions politiques sont siennes », nous a-t-elle écrit. Rassuré par ce sauf-conduit, Zemmour s’emballe. S’il ne porte pas encore les talonnettes que certains lui recommandent, le journaliste aux yeux verts s’exerce à redresser sa posture, mais peine à cesser de hausser les épaules et de pencher la tête sur le côté, comme le ferait un enfant pris en flagrant délit de bêtise.

« Il est né petit, maigrichon et adulé par sa mère, ça laisse des traces », plaisante Isabelle Balkany

Oui, au seuil de l’été, il y croit. Il l’entend, il le sent, il vibre. C’est simple : pour lui, le cœur de la France bat majoritairement à droite, or Marine Le Pen s’édulcore, Marion Maréchal n’attend que la chute de sa tante et LR s’est laissé dévorer de l’intérieur par LREM. Le paysage ainsi brossé, qui d’autre que lui, dont les audiences dans « Face à l’info », sur CNews, ont triplé en un an ? Lui qui s’abrite derrière un curieux parapluie noir tant, à chaque pas, les passants le saluent et l’encouragent ? Oui, il s’engagera « pour l’union des droites et la défense du peuple français » – l’expression est rapportée par un proche. Seulement, bien que pénétré de la certitude qu’il serait appelé par l’Histoire à sauver la nation du naufrage civilisationnel, le candidat putatif reste consumé par l’angoisse. Comment concilier une éprouvante course vers l’Élysée et ses habitudes rigides, son programme auquel rien, jamais, ne le fait déroger ?

Échange musclé avec Jean-Luc Mélenchon sur le plateau de RTL, le 12 décembre 2014
Échange musclé avec Jean-Luc Mélenchon sur le plateau de RTL, le 12 décembre 2014© Bukajlo Frederic/ABACA

Deux semaines à Noël dans un resort aux Caraïbes, et tous les étés ce bel hôtel du Var où il s’inflige un emploi du temps millimétré. L’homme qui rêve de présider la République redoute surprise et dépaysement. Quelle aventure, d’ailleurs, fut ce voyage en Hongrie, où l’invita, en 2019, Philippe Martel, ancien directeur de cabinet de Marine Le Pen et ex-directeur du château de Chambord, décédé l’année suivante. Il a raconté partout ces jours de cauchemar, son « Éric » claquemuré dans la chambre d’hôtel, inquiet à l’idée d’errer dans les rues de Budapest. Vivement Paris, son mobilier XVIIIe, son tennis du dimanche matin et ses sachets de fruits frais qu’il achète en personne, obsédé par sa ligne et inquiet d’un mal de dos chronique. « Il est né petit, maigrichon et adulé par sa mère, ça laisse des traces », plaisante Isabelle Balkany, qui se présente comme sa « grande sœur ».

L’ancienne adjointe au maire de Levallois n’est pas favorable à l’aventure électorale de son complice, avec qui elle aimait tant déjeuner au Fouquet’s : « Il est littéraire, cultivé, capable de vous dire à quelle heure Napoléon a pissé à Waterloo, mais il voit la politique comme une joute intellectuelle ; il ne connaît rien au taf, au cambouis. » Elle le lui a écrit récemment : « Imaginons que tu sois élu, tu seras mauvais. » Le « petit frère » a promis de venir lui parler. Hélas, il manque de temps, la course ne lui laisse même plus le loisir d’une visite à Montretout, dans le bureau de Jean-Marie Le Pen, son partenaire de conversation depuis vingt ans.

Gagner la campagne dans les esprits, sans avoir à quitter ses employeurs

Chez les zemmouriens, on assure compter sur le soutien du fondateur du Front national et sur celui de sa petite-fille, Marion Maréchal, qui a placé autour de l’éditorialiste nombre de ses fidèles et lui fait cadeau d’un silence approbateur. Confirmant lui aussi l’ambition présidentielle de Zemmour, l’avocat Olivier Pardo a fait sa connaissance voici un quart de siècle, grâce à Mme Marcel, l’institutrice en chef du cours Hattemer, où ses enfants étaient scolarisés dans les mêmes classes que les deux garçons et la fille d’Éric Zemmour. L’école privée parisienne professe une pédagogie surannée, salutaire aux yeux du journaliste, nostalgique obsessionnel de la France sépia des années 1960. Depuis ces rencontres de préau, le temps a filé. Ancien juge d’instruction passé par quelques cabinets ministériels, Pardo a enfilé la robe noire, et le chroniqueur a fourbi sa verve. Douze fois, Pardo l’a défendu devant les tribunaux : « Sur douze affaires, nous n’avons perdu que la première ; Éric est un intellectuel dont la pensée n’est pas hors du champ légal. » La chronique judiciaire est un brin plus complexe. Condamné en 2020 au pénal pour « injure et provocation à la haine », Zemmour a porté devant la Cour européenne des droits de l’homme sa deuxième condamnation pour des propos anti-musulmans tenus en 2019. Quant aux articles selon lesquels il aurait importuné des femmes, son défenseur les balaie : « Éric a la réputation d’être un séducteur mais le parquet n’a, à ma connaissance, ouvert aucune enquête. »

Séance de dédicace pour « Le suicide français », au Salon du livre de Paris, en mars 2015.
Séance de dédicace pour « Le suicide français », au Salon du livre de Paris, en mars 2015.© Domine-Wyters/ABACA

À l’heure de sauter du haut de la falaise pour entrer dans le combat électoral, Éric Zemmour vit un drame. D’un côté sa nature : solitaire, routinière, obsessionnelle ; de l’autre, son appétit : gigantesque, orgueilleux. Déchiré par ces forces contraires, écartelé entre confort et destin, il vise, selon le résumé de Paul-Marie Coûteaux, « les deux Français sur trois qui croient en la France, qui tiennent à l’autorité de l’État, qui pensent que la famille c’est un père, une mère, des enfants, et qui, pour cela, jugent nécessaire l’union des droites », mais il redoute le vertige d’une candidature sans retour. En janvier, son plan était de ne se déclarer que tout début 2022. Histoire de profiter de ses audiences télévisées quotidiennes et de marteler ainsi ses idées cinq heures par semaine, sans contradicteur ou presque, et surtout sans être soumis au décompte des temps de parole du CSA. Gagner la campagne dans les esprits, sans avoir à quitter ses employeurs. Une campagne éclair, disait-il en substance, quatre mois au maximum ; d’ailleurs Emmanuel Macron n’est-il pas lui aussi parti sans mandat en 2017, sans s’abîmer dans une primaire ?

Reporter la grande bascule, conserver ses balades, les dîners mondains, et puis ses soirées passées à discuter du destin de la nation avec Sarah Knafo, énarque et magistrate à la Cour des comptes, dont il s’est attaché l’enthousiasme radieux et pugnace. Comme, autour de lui, la garde est jeune, celle-ci approuve l’échéancier intenable. Allumer le désir, lancer des œillades appuyées, jouer – lourdement – avec les sous-entendus. Comme quand il prend la pose, ce 18 juin, à Lille, devant la maison natale du général de Gaulle, osant une comparaison entre le grand homme, « un écrivain avant d’être un soldat, un intellectuel, un homme qui connaît l’histoire de France » et lui-même…

Le livre ? « On le sort en septembre, ce sera une façon de lancer ma campagne »

« Penses-tu que le général de Gaulle se serait soucié d’un plan média avant de rejoindre Londres ? » lui a lancé Paul-Marie Coûteaux. Ce dernier, directeur de la revue « Le Nouveau Conservateur » et ancienne plume de Marine Le Pen, Nicolas Dupont-Aignan et François Fillon, veille sur celui qui pourrait, enfin, réaliser son vieux rêve souverainiste. C’est Coûteaux qui a suggéré à Zemmour de porter une cravate – un présidentiable ne parle pas le col de chemise ouvert. Lui aussi qui le supplie de cesser les moulinets des mains à la télévision, lui encore qui relit, privilège insigne, les chapitres de son prochain livre. Il évoque pour décrire ce texte, mystérieux et attendu, une forme empruntée au journal intime, une balade littéraire, personnelle, inspirée de « Choses vues » de Victor Hugo, un itinéraire ponctué d’incises programmatiques. Ensemble, ces deux contempteurs de la construction européenne échangent des idées, des références, car le journaliste apprécie la culture historique du propriétaire du château de Charmant, une place forte templière en Charente. Cet ouvrage, dont le contrat a été signé avec Albin Michel en 2016, devait être rendu en 2019. Il n’en a rien été. Travailleur acharné, Éric Zemmour dit avoir manqué de temps pour peaufiner ce texte différent de ses cinq best-sellers précédents. Mais, patatras ! voici qu’à cause de ce livre, le secret de sa candidature s’est ébréché, obligeant le quasi-prétendant à tordre la véracité des faits.

Début juin, en effet, chez Albin Michel, on s’impatientait de ne pas avoir reçu le manuscrit. Un texte, même promis à un grand succès commercial, nécessite une logistique de six mois avant parution, exceptionnellement réductible à trois mois. Gilles Haéri, directeur général, Lise Boëll, éditrice de Zemmour, l’ont pressé. Ce manuscrit aurait dû être rendu en janvier pour être publié à l’automne ; si on tarde, il faudra le reporter à 2022. Dans la foulée, le 9 juin, l’éditeur adresse un SMS à Zemmour pour lui proposer une rencontre. Deux jours de silence. Réponse le 11 juin, rendez-vous pris le soir même dans un café du quartier de Sèvres-Babylone. Aux dires des rares initiés, l’entrevue fut affable. Quand Haéri s’est enquis de l’ambition politique de son auteur, celui-ci a répondu ne plus pouvoir se dérober ; cinq ans qu’il répète la même chose, il en a 62, il ne va pas ratiociner encore pendant cinq autres années. Et le livre ? « On le sort en septembre, ce sera une façon de lancer ma campagne », aurait poursuivi le journaliste.

À cet instant, la conversation s’est électrisée. Les livres de candidats sont denrée commune, mais leurs auteurs ne masquent pas leur dessein, ils avancent à découvert. Comment envisager de profiter de l’énorme machine promotionnelle d’Albin Michel sans dévoiler les ambitions du signataire ? Ne serait-ce pas une façon de prendre la maison en otage ? Dans ces conditions, mieux vaut renoncer. D’après les témoignages concordants, Éric Zemmour n’aurait pas été étonné du tour pris par la discussion, demandant tout à trac que lui soit adressé « un papier » actant la renonciation. Une semaine plus tard, seconde conversation, téléphonique cette fois, entre Haéri et Zemmour. Ce dernier souhaitait garder les 30 000 euros déjà perçus (un tiers de son avance) et demandait une lettre le confirmant. La secrétaire générale d’Albin Michel a rédigé le document. L’auteur l’a relancé par SMS, puis par e-mail ; il s’impatiente, le courrier n’arrive pas, peut-on l’envoyer à son adresse personnelle au plus vite ? Ce qui fut fait.

Son livre, dont la publicité est désormais assurée, verra le jour cet automne, vraisemblablement édité par une société créée pour l’occasion

Et puis, le 28 juin, à l’antenne sur CNews, changement de registre. Zemmour raconte une histoire différente et assure, la mine chagrine, « être un peu en l’air, un peu perturbé », depuis qu’il a reçu une lettre de son éditeur, actant le refus de le publier, un choc. Aussitôt, les réseaux s’enflamment, hurlent à la censure. Agacé, le patron d’Albin Michel diffuse un communiqué. Il maintient que Zemmour lui a fait part de ses ambitions présidentielles. Conversation « imaginaire », réplique le journaliste. En réalité, son livre, dont la publicité est désormais assurée, verra le jour cet automne, vraisemblablement édité par une société créée pour l’occasion, une maison éphémère que Philippe de Villiers rejoindrait aussi, son mérite – et ce n’est pas le moindre – étant d’assurer des revenus bien plus importants que ceux versés par une maison ayant pignon sur rue.

Voici dix ans, vers 2010, Éric Zemmour était un journaliste politique prometteur, féru d’histoire de France et le biographe d’Édouard Balladur et de Jacques Chirac. Un quinquagénaire affable dont les costumes négligés trahissaient l’homme d’écriture. Il enchaînait sa chronique hebdomadaire pour « Le Figaro Magazine », une autre, quotidienne, dans la matinale de RTL et le soir, participait à « Ça se dispute », émission de la chaîne d’informations i>Télé, où il affrontait Nicolas Domenach, journaliste social-démocrate, dans un combat féroce, mais courtois. Un jour, Domenach se retrouve à prendre dans la même journée huit taxis différents, dont les chauffeurs lui parlent tous de son duo télévisé avec Zemmour. Amusé par cette popularité, il en fait part à son partenaire. Sait-il que huit taxis sur huit regardent leur émission ? Quel succès, quelle blague ! Réponse de Zemmour : « Je suis sûr que les huit étaient d’accord avec ce que je dis moi. » Convaincu que ceux qui l’écoutent l’approuvent, Éric Zemmour s’est enivré d’une décennie de succès médiatique, il s’est laissé griser d’une exponentielle martingale des audiences et n’a jamais su que, sur les huit chauffeurs, trois partageaient ses idées, trois soutenaient celles de son contradicteur, et les deux derniers n’avaient pas d’avis.

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