LES PIÈCES DU PUZZLE DE LA RESTITUTION DES OEUVRES D’ARTS DU SÉNÉGAL PILLÉES SE CONSTITUENT

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Le Musée des civilisations noires (Mcn) a mis sur pied une commission spéciale pour la restitution des collections sénégalaises spoliées en période coloniale et conservées dans les musées occidentaux

Sitapha BADJI  |   Publication 17/11/2021

Le Musée des civilisations noires (Mcn) a mis sur pied une commission spéciale pour la restitution des collections sénégalaises spoliées en période coloniale et conservées dans les musées occidentaux.

La restitution du sabre d’El Hadji Omar Tall, enregistrée dans le patrimoine français comme étant « inaliénable et restituable », le 17 novembre 2019, est le premier acte de la vague de retour des œuvres africaines à la source. C’est dans cette veine que des acteurs culturels et universitaires se sont retrouvés hier, au musée des civilisations noires (Mcn), afin de s’atteler à l’installation officielle de la commission supérieure chargée de l’inventaire et du pilotage de la restitution des biens sénégalais spoliés par les Occidentaux.

Ainsi, ces acteurs se joignent à la revendication des communautés pour la restitution des œuvres confisquées par les pays occidentaux, notamment lors de la période coloniale. « Restituer », selon la définition du Petit Larousse, c’est rendre quelque chose à son propriétaire légitime. Et les peuples, notamment du Sénégal et du Bénin, ont réclamé des collections conservées dans les musées occidentaux. Pour ce faire, des démarches sont entreprises dans ce sens avec entre autres l’installation d’une commission opérationnelle qui se chargera de l’inventaire et celle qui a la charge de la restitution. Directeur du Musée des civilisations noires, Pr Hamady Bocoum, l’hôte de l’initiative, indique : « La mission de la commission, c’est de répertorier, de documenter, piloter le retour et la réinterprétation des objets afin d’en ramener le maximum possible dans nos pays. » Et dans un autre sens, il s’agit de faire le même travail pour inventorier les objets qui sont dans nos terroirs pour ne pas les perdre. D’autant qu’aujourd’hui, l’Afrique s’interroge sur son futur et travaille pour son unité.

Par conséquent, ce n’est pas seulement la question politique qui est en jeu, car cette dernière est dans une logique de diversité territoriale. Or, la continuité culturelle ignore les frontières héritées de la colonisation. « C’est cette puissante gomme qui doit être manipulée pour faire de sorte que la vague annoncée de la restitution ne nous foudroie pas, mais que nous surfions plutôt sur la vague pour revisiter nos continuités culturelles. Seulement, on ne doit pas oublier le reste. Car il y a des créateurs qui continuent de créer, du fait que le patrimoine de demain, c’est l’œuvre d’aujourd’hui. Il s’agit de réécrire notre histoire », assume le directeur du musée des civilisations noires.

PR HAMADY BOCOUM : L’AUTHENTICITE DES ŒUVRES AFRICAINES EST UN LEURRE

La question de l’authenticité souvent brandie par certains connaisseurs des arts est battue en brèche par le Pr Bocoum. Ce qu’ils appellent art africain est, selon le directeur du Mcn, un leurre. Car la plupart des objets qui sont dans les collections des occidentaux, de l’avis de Pr Bocoum, auraient été détruits et reconstruits. Parce que, explique-t-il, la culture africaine est dynamique : « On fait une production, elle finit son cycle de vie et d’autres productions sont faites. » Le musée à l’occidental est également renié par l’ancien directeur du patrimoine. Sur la question, M. Bocoum indique qu’il faudrait avoir une vision propre à l’Afrique. C’est dire que « nos espaces de concertations des œuvres d’art ne sont pas des musées ethnologiques (étude de l’autre), non plus anthropologique (qui avait légitimé la thèse de stratification raciale), ni chromatique (n’étant pas un musée de l’homme noir). On est dans l’insubordination. Il n’y a pas de musée que l’on considère comme un modèle. Il faut toujours rester dans la créativité, l’inventivité voire progressivement inventer un modèle que les populations comprennent, dans lequel elles se reconnaissent et qu’ils (ces musées) soient des espaces de rencontre ».

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