Sur le plateau du Grand rendez-vous d’Europe 1, ce dimanche, le philosophe Michel Onfray s’est penché sur le thème du « wokisme », cette pensée importée des États-Unis qui défend les injustices subies par les minorités. Pour l’essayiste, cette « idéologie » est le reflet d’une minorité « tyrannique » devenue « majorité ».
INTERVIEWLe « wokisme » , utilisé au départ pour désigner la lutte antiraciste des Afro-Américains, s’est inscrit par la suite comme discours des sphères militantes pour dénoncer toutes formes d’injustices (sexuelles, ethniques ou religieuses) subies par les minorités. Pour le philosophe Michel Onfray, invité du Grand rendez-vous sur Europe 1, la pensée « woke » tend vers une « destruction de la culture », engendrée par une « tyrannie » de ces mêmes minorités.
Des minorités qui deviennent majoritaires
« Sociologiquement, les minorités ne sont pas majoritaires, par définition (…) Tocqueville se trompait quand il disait que le problème de la démocratie, ce serait la tyrannie des majorités », décrit le philosophe. « Dans toutes les publicités, aujourd’hui, on vend de l’électricité, on vous vend une voiture hybride, on vend du café et vous avez toujours l’idéologie de la petite fille insupportable qui donne des leçons à ses parents parce qu’ils ne trouvent pas les dosettes de café ou je ne sais quoi. Ou deux filles qui s’embrassent sur la bouche ou un couple mixte. C’est bien, d’accord, mais il n’y a pas que ça en France. »
Une « cérémonie nazie »
Le philosophe en appelle alors à la préservation et au « respect » des œuvres. « Publicité, cinéma, théâtre, littérature. Mais on commence à faire sauter des passages dans des livres. On a vu l’autre jour à la télévision, Madame Bovary qui devenait Emma Bovary parce que c’est une copine. Il faut qu’on raconte qu’elle est victime du système patriarcal, du machisme d’État. Mais on fait un autre film alors. Si on adapte Madame Bovary, on est respectueux de ce que dit Flaubert. »
Autre exemple repris par le philosophe, les autodafés, cette action de détruire les livres par le feu, déjà pratiquée sur les BDs de Lucky Luke au Canada en raison de la représentation des Amérindiens qui y était faite. « On les brûle, on a de la cendre, et on utilise ces cendres pour faire de l’engrais pour un arbre qui va dire la beauté du monde ? Vous vous rendez compte ? C’est une cérémonie nazie, cette façon de brûler des livres et d’estimer qu’on va purifier avec la cendre des arbres. »
« Les élites (de France) sont très woke »
Si le « wokisme » a été importé des États-Unis, en France, pour le philosophe, la représentation de cette idéologie se fait par les élites. « Je pense que les élites sont très woke. Que le Monde, Libé, L’Obs, France Inter, etc, une poignée de gens qui vivent la plupart du temps avec l’argent public – sinon ces journaux s’effondrent totalement s’ils ne sont pas aidés – ils sont minoritaires, mais majoritaires. » Mais une partie de la France résisterait à la pensée « woke », cette « majorité » là aurait alors besoin d’un « peu de courage ».
« J’ai des copains qui disent : ‘Bon, personne ne nous écoute, je peux le dire. Je pense comme toi aussi.’ Ce sont des gens de gauche qui effectivement défendent le wokisme, etc. Je leur dis : un peu de courage, osez-le, dites que ça commence à bien faire. » Les élites, elles, ont « déjà sombré » d’après Michel Onfray. « Je ne suis pas sûr que la France résiste autant que ça », conclut le philosophe avant d’ajouter : « Une bonne partie de la France profonde sourit de tout ça, mais ne sourit pas trop fort parce qu’elle n’a pas forcément envie de se faire traiter de fasciste ou de nazie. »