Via un décret, le président américain a pris le contrôle de 7 milliards de dollars d’actifs de la banque centrale d’Afghanistan, déposés aux États-Unis.
Source AFP
C’est une manœuvre peu habituelle que vient d’opérer Joe Biden. Vendredi 11 février, le président américain a signé un décret qui lui permet de prendre la main sur les très nombreux actifs de la banque centrale d’Afghanistan, déposés aux États-Unis. L’actuel locataire de la Maison-Blanche a ainsi mis la main sur environ 7 milliards de dollars. Un joli pactole qu’il entend réserver, pour moitié, aux familles des victimes des attentats du 11 septembre 2001. Pour réussir cette opération, le président démocrate a eu recours à une loi de 1977, qui lui accorde des « pouvoirs économiques extraordinaires ».
Le président américain entend faire transférer ces actifs sur un compte bloqué de la Réserve fédérale de New York, une institution publique, a précisé la Maison-Blanche. Les actifs des banques centrales sont le plus souvent des titres financiers, des devises ou de l’or. Joe Biden veut qu’une moitié de la somme soit réservée pour des demandes d’indemnisation déposées en particulier par des familles de victimes des attentats du 11 septembre 2001.
Une somme en partie réservée à l’aide humanitaire pour le peuple afghan
Il prévoit que l’autre moitié soit consacrée à de l’aide humanitaire pour l’Afghanistan, mais qui serait versée de manière que l’argent ne tombe pas aux mains des talibans, a expliqué la Maison-Blanche. « Il est très important de pouvoir à la fois prendre 3,5 milliards de dollars et s’assurer qu’ils soient utilisés pour le bénéfice du peuple afghan » et par ailleurs de garantir que des familles de victimes du terrorisme « puissent se faire entendre » devant la justice fédérale américaine, a expliqué un haut responsable de la Maison-Blanche lors d’une conférence de presse.
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En clair, il s’agit de mettre en réserve environ 3,5 milliards de dollars en attendant l’issue des procédures judiciaires intentées par ces familles, qui réclament la saisie des avoirs afghans. Le haut responsable américain, qui a souhaité rester anonyme, a reconnu que cet ensemble d’opérations orchestré par la Maison-Blanche était « juridiquement compliqué », et a fait valoir que l’annonce de vendredi n’était que le début d’une procédure qui devrait durer des mois.
Des réserves afghanes aux États-Unis de près de 10 milliards de dollars
La voie choisie par le président américain, qui voit les États-Unis prendre possession des actifs d’un autre État, suscitera certainement de nombreuses controverses, au moment où l’Afghanistan connaît une grave crise humanitaire. Les talibans ont réclamé de prendre le contrôle des réserves de la banque centrale afghane, et la Russie notamment a également exhorté les États-Unis à débloquer ces avoirs.
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Au total, les réserves brutes de la banque centrale afghane s’élevaient fin avril 2021 à 9,4 milliards de dollars, selon le Fonds monétaire international. Cette somme, déposée avant que les talibans ne reprennent le pouvoir en août dernier, est détenue surtout à l’étranger, et pour la majeure partie aux États-Unis.
Des actifs de quelle provenance ?
Certainement conscients des controverses que la décision ne manquera pas de susciter, les responsables de la Maison-Blanche ont assuré que ces réserves de la banque centrale afghane « provenaient de l’assistance continue et significative [à l’Afghanistan, NDLR] des États-Unis et d’autres donateurs internationaux pendant deux décennies ». L’exécutif américain a aussi rappelé que les États-Unis étaient déjà le principal fournisseur d’aide à l’Afghanistan, et a assuré que cette aide bilatérale restait distincte de la procédure de gel des actifs de la banque centrale afghane.
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« Ce décret va permettre de garder une partie substantielle des réserves de l’Afghanistan pour le bénéfice du peuple afghan, mais nous comprenons que les problèmes économiques de l’Afghanistan, exacerbés par la prise du pouvoir par les talibans, ne peuvent être résolus de manière simple », a estimé la Maison-Blanche dans un communiqué.