L’ancien maire de Dakar multiplie les appels à l’endroit de son parti d’origine – le Parti socialiste – mais aussi à l’intention de tous les partis de gauche constituant le socle de la majorité présidentielle
Loin des affrontements, de l’odeur nauséabonde des grenades lacrymogènes et autres invectives qui polluent le climat politique à Dakar, Khalifa Ababacar Sall, qui continue tranquillement sa campagne dans la diaspora et à l’intérieur du pays, joint sa voix à l’appel au dialogue, invite la famille socialiste et une partie de Benno Bokk Yaakaar à soutenir sa candidature. Souvent donnant rendez-vous aux Sénégalais. ‘’Vous allez voir bientôt… ’’, ne cesse-t-il de lancer, sans autre précision.
Après Barthélemy Dias, Khalifa Ababacar Sall embouche la trompette du dialogue pour apaiser le climat politique. Dans un entretien accordé à la chaine Alkuma TV, dans le cadre de sa tournée politique dans le Sénégal oriental, le candidat à la Présidentielle a confirmé son poulain. Interpellé sur la sortie de ce dernier demandant au président d’ouvrir des discussions, il rétorque : ‘’Je suis totalement en phase avec Barthélemy Dias. D’abord, vous savez que personne ne peut reprocher à Barthélemy d’être un poltron ; personne ne peut dire qu’il demande des discussions, parce qu’il a peur. Mais ce que les Sénégalais ne savent pas de Barthélemy, c’est qu’il est fondamentalement politique. Barthélemy est un militant ; il a le sens de l’opportunité ; il a des jugements pointus. S’il le dit (il a dit que Macky Sall a peut-être peur pour son avenir et celui de ses proches, en laissant entendre qu’il est possible de négocier : NDLR), c’est parce qu’il le sent. Je pense que c’est quelque chose de bien possible.’’
Le socialiste ne s’est pas arrêté en si bon chemin. A l’en croire, le Sénégal est un pays de dialogue. ‘’Dans ce pays, affirme-t-il, de Senghor à maintenant, on a connu toutes sortes de difficultés, mais le dialogue n’a jamais été exclu. Ce qui complique la tâche cette fois, tout le monde le sait ; il faut aussi le dire. D’abord, c’est la troisième candidature. Ensuite, ce sont les brimades de ce régime contre l’opposition. Ce pouvoir a mis tout le monde en prison. Tout le monde. C’est ce qui doit cesser. S’il arrête de taper sur les opposants, d’appeler à un dialogue, les gens peuvent discuter. Parce qu’aussi, même la guerre mondiale s’est terminée dans la discussion. Maintenant, tout dépend également de ce qu’on entend par le dialogue. Si l’objectif est de pacifier l’espace politique, si cela doit permettre à tous les candidats de participer, si nous nous mettons d’accord sur les règles jeu, pourquoi pas’’.
En fait, ils sont nombreux les acteurs à penser que le président de la République ne veut pas lâcher le pouvoir de peur de représailles contre lui ou ses proches en cas de perte de pouvoir. Si Barth et son mentor s’accordent à vouloir lui aménager une possible sortie honorable, Ousmane Sonko, lui, a été plus ou moins nuancé.
Dans l’une de ces dernières déclarations, il disait : ‘’Les Sénégalais ne doivent plus rien à Macky Sall. Ils lui ont tout donné. Il faut qu’il sache que ce n’est pas lui qui va nous imposer qui sera le prochain président de ce pays. Les Sénégalais vont choisir librement celui ou celle en qui ils ont confiance. Il ne va nous imposer personne. Ni quelqu’un qui vient de son camp ni un membre de l’opposition. Abdoulaye Wade ne nous avait imposé personne. Macky Sall, non plus, ne va pas nous imposer son successeur… Certains disent qu’il faut le rassurer, qu’il faut lui donner des garanties… Est-ce que lui avait donné des garanties à Abdoulaye Wade ? Et puis, de quoi a-t-il peur ? Pour quelqu’un qui a toutes les immunités, qui ne peut être poursuivi qu’en cas de haute trahison, de quoi a-t-il peur ? Il n’a qu’à terminer son mandat et organiser des élections, partir tranquillement’’.
‘’J’ai constaté que toutes les forces de gauche dont les 2/3 sont dans Benno Bokk Yaakaar ont décidé de se battre’’
Khalifa pourrait-il être le recours du président et de Benno Bokk Yaakaar que Macky Sall pourrait essayer de proposer ? Une chose est sûre : de plus en plus, l’ancien maire de Dakar fait allusion à son passé dans la coalition Benno Bokk Yaakaar et multiplie les appels à l’endroit non seulement de son parti d’origine – le Parti socialiste – mais aussi à l’intention de tous les partis de gauche qui constituent le socle de la majorité présidentielle.
Dans le cadre de sa tournée politique, l’ancien maire de Dakar a réaffirmé : ‘’J’ai constaté que toutes les forces de gauche, dont les 2/3 sont dans Benno Bokk Yaakaar, ont décidé de se battre. S’ils doivent se mettre autour d’une candidature de gauche, je pense que je suis le mieux placé et le mieux indiqué pour être leur candidat.’’ Tout cela intervient dans un contexte où, à Pastef, des partisans s’interrogent de plus en plus sur l’absence d’un soutien actif des deux leaders, surtout celle de Barthélemy Dias accusé de n’avoir même pas publié un message de soutien sur sa page.
Pendant ce temps, Khalifa Sall continue de tisser sa toile dans le Sénégal des profondeurs, de multiplier les appels à l’endroit non seulement des forces de gauche de Benno Bokk Yaakaar, mais surtout du Parti socialiste.
Hier encore, il a remis ça : ‘’A travers Douga (le siège de Taxawu porte son nom), Lansana (Kanté responsable de Taxawu à Tamba : NDLR) a lancé un appel à la réconciliation de la famille socialiste à Tamba. Ce qui vient amplifier l’appel que j’ai fait sur le plan national. Nous rendons grâce au Bon Dieu parce que non seulement la famille de Douga est venue, mais tous les camarades du PS que je connais dans la région sont venus. Et bientôt, vous aurez d’autres bonnes nouvelles. Parce que comme vous l’avez constaté dans les autres localités, nos camarades socialistes de la base sont en train de répondre favorablement à notre invitation. Vous allez bientôt les entendre.’’
Sous le concept ‘’Motali Yéene’’, Khalifa Ababacar Sall veut ainsi convaincre de sa candidature pour 2024 dont il n’a plus aucun doute de la recevabilité, mais aussi essayer d’implanter sa plateforme dans toutes les localités du Sénégal. Dans ce cadre, l’étape de Tamba a été remplie d’émotion, selon lui, car c’est là où la machine judiciaire l’avait stoppé net en 2017, pour l’envoyer en prison. Il révèle : ‘’On m’avait dit que si tu n’arrêtes pas les tournées, tu iras en prison. Je leur avais dit : vous pouvez alors préparer ma cellule, parce que je n’arrêterai pas.
Les partisans du ministre de la Justice d’alors nous avaient attaqués ici. Et comme vous le savez, nous sommes de Dakar, de Grand-Yoff, nous ne provoquons personne, mais quand on nous provoque, on répond. Nous sommes comme le porc-épic, qui s’y frotte s’y pique. Nous avions donc porté la réplique. C’est pourquoi il (le ministre de la Justice de l’époque, Sidiki Kaba) n’a pas été que mon ministre de la Justice, mais plutôt mon procureur. Il s’est beaucoup substitué à Bassirou Guèye. Lui et Ismaila Madior. Je suis donc revenu dans la joie, dans l’apothéose. Je rends grâce à Dieu. Ce qui se passe en ce moment a effacé ce qui s’est passé en 2017.’’