La visite d’un président américain à Hiroshima est un symbole très fort. Mais si Obama y est allé à pas comptés, c’est parce que l’histoire n’est encore pas lue par tous de la même manière.
6 Aout 1945, Hiroshima. Près de 200 000 morts, brulés et irradiés, civils pour l’essentiel… La bombe A vient d’être utilisée. Le champignon monte à 18 kilomètre dans l’atmosphère. Le monde entier est frappé de stupeur. Jamais on n’avait vu un tel engin de mort s’abattre sur l’humanité. La sidération et les remords ne gagnent manifestement pas la Maison Blanche. 3 jours plus tard, rebelote. Nagasaki : 100 000 morts. Le Japon capitule, mettant fin à la Seconde Guerre mondiale
Hiroshima, la responsabilité des USA
Jamais par la suite l’arme atomique ne sera utilisée à nouveau. Elle est depuis l’arme taboue, celle que l’on ne peut pas déclencher sauf à conduire la planète et l’humanité tout entière vers sa destruction.
Hiroshima, c’est bien les USA et eux seul qui en assument la responsabilité devant l’Histoire. La seule bombe atomique de l’Histoire a été larguée froidement par la plus grande démocratie du monde. Par le pays qui se présente comme l’incarnation de ces valeurs démocratiques, humanistes et morales qui distinguent les républiques des tyrannies. « Le bien du mal » comme aiment à le dire les président américains.
Hiroshima n’avait aucun but militaire. Il ne s’agissait pas de bombarder des installations ou un QG. Il ne s’agissait même pas de détruire une flotte comme Pearl Harbour. Il s’agissait de faire peur, d’effrayer l’ennemi pour le pousser à capituler. « La mort est tombée du ciel » a dit Obama comme s’il s’agissait d’un Tsunami. Non, elle est tombée d’un avion américain et la bombe avait même un petit surnom « Little boy ». « Je savais que je bombardais des civils » dira le pilote de l’avion Enola Gay, qui jusqu’à la fin de vie, célébré décoré et adulé, dira qu’il a toujours bien dormi.
Un crime de guerre qui jamais ne sera jugé
Pourtant, objectivement, Hiroshima est un crime de guerre qui jamais ne sera jugé, puni, ni même condamné. Enola Gay, l’avion qui a largué la bombe, est exposé au musée de l’air américain avec fierté. Pourquoi autant de certitude ? Parce que ce que nous avons tous lu dans les livres d’histoire était limpide : “Hiroshima a permis de mettre fin à la 2 ème guerre mondiale et d’éviter de poursuivre la boucherie”.
Cette phrase porte toute l’ambiguïté de l’histoire. Aujourd’hui, beaucoup d’historiens américains reviennent sur cette idée, expliquant que de toute manière l’Empire japonais allait rendre les armes progressivement, de guerre lasse.
Qu’Hiroshima ait provoqué la capitulation du Japon et la fin de la guerre dans le pacifique est un fait. Une conséquence incontestable du largage de la bombe. Le président Truman ne voulait sûrement pas rester engagé dans un combat classique. Le débarquement sur les plages Italiennes et Françaises est encore en tête. Trop compliqué, trop risqué trop aléatoire pour espérer rééditer l’opération européenne en Asie où des chapelets d’iles sont à reconquérir. Soit.
La bombe atomique, un club très fermé
Mais imaginer qu’ensuite, la Maison Blanche a été tétanisée par son geste, convaincue d’avoir commis “un mal nécessaire” qu’il faudrait bannir de nos esprits serait une erreur. Non. 6 ans plus tard, le général Mac Arthur est à 2 doigts de convaincre le président américain de recommencer en Corée et de larguer une troisième bombe atomique, plus perfectionnée et dévastatrice encore. Il se contentera de bombardements incendiaires.
La destruction aveugle était devenue une option militaire. Par la suite, la course à l’armement ne s’est jamais arrêtée. Loin d’effrayer, ce crime de guerre a fasciné les dirigeants. Hiroshima a été la démonstration de force absolue. La bombe devient l’apanage de la puissance.
Dans la foulée de la Seconde Guerre mondiale, l’ONU se construit sur des idéaux de paix et de fraternité. Mais les 5 pays qui vont diriger cette instance, et de fait la marche du monde, ont tous la bombe atomique. Le club est formé et ils feront tout pour que personne d’autre n’y entre. Voilà la leçon de l’Histoire qu’Obama ne peut pas assumer. Le monde dans lequel nous vivons, ce monde post Seconde Guerre mondiale, sous leadership américain s’est construit sur le crime d’Hiroshima.