Dans le prestigieux quotidien new-yorkais, l’écrivain passe au crible les dérives du pouvoir sortant. Entre crispations autocratiques et répression sanglante des manifestants, le règne de Macky est dépeint comme un cauchemar pour la démocratie du pays
Dans un éditorial publié dans le New York Times du 21 mars 2024, l’écrivain Boubacar Boris Diop dresse un portrait sans concession du président Macky Sall, dont le règne trouble touche bientôt à sa fin. Alors que le Sénégal s’apprête à élire un nouveau chef d’État ce dimanche 24 mars, M. Diop décrit les dernières années du mandat de Macky Sall comme « brouillonnes et parfois grotesques », menaçant de fragiliser la stabilité chèrement acquise par le pays.
Selon l’auteur, les ennuis du président ont commencé en février dernier lorsqu’il a reporté in extremis l’élection présidentielle, prévue ce mois-là, après avoir pris l’engagement de ne pas se représenter pour un troisième mandat. Cette décision, perçue comme une tentative de contourner la Constitution, a plongé le Sénégal dans une crise majeure, avec manifestations, troubles parlementaires et remise en cause de l’ordre démocratique. Bien que contraint par le Conseil constitutionnel à respecter le calendrier initial, Macky Sall a sérieusement écorné son image en agissant de la sorte.
Depuis lors, poursuit Diop, le chef de l’État sortant n’a cessé de s’embourber, entre comportements excessifs à l’égard de ses ministres et velléités autocratiques accrues ces dernières années. Après avoir réprimé violemment les manifestations pro-opposition à partir de 2021, faisant au moins 40 morts selon des ONG, il a bâillonné la société civile en emprisonnant plus de 1000 militants. Macky Sall, qui se targuait en 2012 de resserrer les limites du pouvoir exécutif, s’est finalement révélé autoritaire et de plus en plus enclin à bafouer les règles démocratiques.
Si le bilan économique et social de ses deux mandats reste positif, l’éditorialiste estime que Macky Sall, « le quatrième président de l’histoire du Sénégal post-indépendance », est le premier à qui l’on accole l’étiquette de « dictateur ». Il conclut en mettant en garde contre les troubles potentiels qui pourraient survenir autour ou après l’élection, notamment si les résultats étaient contestés. Pour Diop, le président sortant porte l’entière responsabilité de cette incertitude politique inédite, alors que le Sénégal a toujours su faire figure de modèle démocratique en Afrique.