Dans un entretien accordé au journal Le Soleil, l’économiste sénégalais Felwine Sarr donne son avis sur le débat sur le franc CFA. À ce propos, sa position est claire : le Sénégal doit se détourner de cette monnaie héritée de la colonisation. «Nos arguments consistent à dire que les accords de coopération monétaire avec la France nous entravent et nous empêchent d’avoir une politique monétaire proactive qui est tournée vers la satisfaction de nos besoins en termes de croissance économique et que celle-ci est trop contrainte à l’arrimage à l’euro… Cela entrave notre compétitivité externe», tranche le professeur à Duke University (États-Unis).
Celui qui est en même temps écrivain poursuit : «Les études nous ont montré qu’un régime de change plus flexible dont les marges de fluctuations sont encadrées avec un arrimage de la monnaie à un panier de devises au prorata des monnaies des pays avec lesquels on commerce le plus, était beaucoup plus optimal en termes de bien-être et de croissance économique.»
Faut-il engager la réforme au niveau communautaire ou locale ? Felwine Sarr plaide pour la première approche. Il demande en ce sens «d’accélérer le projet de l’éco dans le cadre de la CEDEAO» afin «de préserver les gains d’une intégration monétaire et économique».
L’économiste n’écarte pas pour autant la seconde possibilité. Mais il prône la prudence : «Si nous devons aller vers une monnaie nationale, il faudra s’assurer des conditions économiques pour bien le faire parce que l’on voit bien que c’est à double tranchant. Actuellement, il y a 23 monnaies africaines qui sont dans la tourmente. Il faut donc réfléchir au bon ‘trade-off’ pour assurer l’effectivité des fonctions de la monnaie. C’est une réflexion à mener avec soin.»