Guerre en Ukraine : que peut-on attendre du sommet pour la paix en Suisse ?

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Évoqué dès le mois de janvier, le sommet pour la paix en Ukraine se déroule ce week-end en Suisse. Mais en l’absence de la Russie et de la Chine, la plupart des grands acteurs du Sud global ont préféré décliner l’invitation. Une situation qui pourrait compromettre les résultats espérés par le président Volodymyr Zelensky, arrivé vendredi en Suisse et en quête d’un plus large soutien international pour adhérer à la feuille de route ukrainienne vers « une paix juste et durable ».

Forum de Singapour début juin, cérémonies du Débarquement, visite d’État en France puis déplacement en Allemagne, tournée au Moyen-Orient, G7 en Italie… Volodymyr Zelensky, arrivé vendredi en Suisse, n’a pas ménagé ses efforts ces dernières semaines pour rallier à sa cause un maximum de pays avant le sommet pour la paix qui se déroule les samedi 15 et dimanche 16 juin, sur la montagne du Bürgenstock.

Portrait de Volodomyr ZELENSKY © Malick MBOW
Portrait de Volodomyr ZELENSKY © Malick MBOW

L’Ukraine espère ainsi un consensus mondial allant au-delà de ses alliés occidentaux et réunissant des pays du Sud que Moscou courtise pour accroître la pression sur la Russie.

Mais l’élargissement du soutien à Kiev semble loin d’être acquis. Si l’Ukraine peut se targuer de la présence de plus de 90 pays et organisations, la moitié des dirigeants qui feront le déplacement seront Européens. Le président américain Joe Biden n’y sera pas, mais a envoyé sa vice-présidente, Kamala Harris.

Face à l’absence programmée de Moscou, la Chine, proche alliée du Kremlin, a affirmé que les pourparlers n’avaient de sens que si la Russie et l’Ukraine y participaient. Des déclarations qui ont affaibli les espoirs d’une quelconque avancée majeure lors des discussions qui se tiendront au complexe hôtelier du Bürgenstock, situé sur les hauteurs du lac des Quatre-Cantons près de Lucerne.

Les pays du Sud aux abonnés absents

Habituellement mesuré dans ses critiques vis-à-vis de la Chine, Volodymyr Zelensky a subitement changé de ton en accusant Pékin d’avoir usé de son influence pour dissuader les pays du Sud de participer à ce rendez-vous diplomatique.

« Malheureusement, la Chine s’efforce aujourd’hui d’empêcher des pays de venir au Sommet pour la paix », a déclaré le 2 juin le président ukrainien à des journalistes, en marge du forum sur la sécurité à Singapour.

De fait, la liste des absents de poids est longue : Indonésie, Égypte, Afrique du Sud, Arabie saoudite… Le Brésil a quant lui consenti à y envoyer son ambassadrice en tant qu’observatrice. Les relations entre le président Luiz Inacio Lula da Silva et son homologue ukrainien restent exécrables. En mai 2022, le président brésilien avait suscité un tollé à Kiev en affirmant que Volodymyr Zelensky était « aussi responsable de la guerre que Poutine. Une guerre n’a jamais un seul coupable ».

Fidèle à sa doctrine de « multi alignement », l’Inde, qui entretient une relation privilégiée avec Moscou depuis l’époque soviétique sera également absente. Deux ans après l’invasion de l’Ukraine, la Russie est un partenaire de plus en plus essentiel pour le pays le plus peuplé du monde. Premier fournisseur d’armes avant la guerre, Moscou s’est également imposé comme son premier fournisseur de pétrole.

Les absences en Suisse des chefs d’État du Sud global témoignent du fossé grandissant avec les Occidentaux sur le dossier ukrainien. Un décalage qui s’est accentué avec la guerre à Gaza. En apportant leur soutien à Israël, les dirigeants occidentaux ont suscité la colère des États arabes et de nombreux pays du Sud ralliés à la cause palestinienne.

Un sommet pour la paix mais sans la Russie

L’autre grande faiblesse de ce sommet pour la paix réside dans l’absence de la Russie qui n’a pas été conviée. « Une conférence sur la paix, dans laquelle il n’y a même pas les deux parties qui sont en train de faire la guerre sur le terrain, est un premier pas pour établir un processus. Il serait illusoire de prétendre que tout soit clair et que samedi soir on puisse fêter la paix », a reconnu lundi le chef de la diplomatie helvétique, Ignazio Cassis.

Andriy Iermak, chef de l’administration présidentielle ukrainienne, a confirmé mardi que Moscou pourrait être convié dans un second temps, une fois qu’un « plan commun » aura été validé à Bürgenstock.

« Nous envisageons la possibilité, lors du deuxième sommet, d’inviter un représentant de la Russie et de présenter ensemble ce plan commun ».

De son côté, la Russie a déjà balayé par avance les résultats du sommet et aurait tout fait, selon Kiev, pour torpiller ce rendez-vous en décourageant d’autres pays d’y participer. Les autorités suisses ont également indiqué jeudi avoir constaté les premières cyberattaques liées à l’organisation de la Conférence sur la paix en Ukraine.

« Ces attaques sont du domaine de l’attendu et il n’y a actuellement pas de danger aigu », a précisé l’Office fédéral de la cybersécurité dans un communiqué, sans attribuer l’origine des attaques.

Photo de famille

Pour Moscou, le plan ukrainien qui comprend notamment la restauration de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, le retrait des troupes russes ou encore l’établissement d’un tribunal spécial sur l’agression russe, est inacceptable. La Russie affirme être disposée à négocier une paix si l’Ukraine lui cède les cinq régions qu’elle occupe.

Malgré les limites de l’exercice diplomatique qui se jouera en Suisse, le moment reste crucial pour Kiev alors que ses forces armées sont en difficulté sur le front Est. L’armée ukrainienne a encore fait part jeudi d’une situation « tendue » aux abords d’Ivanivske, une localité voisine de Tchassiv Iar, que la Russie juge stratégique pour effectuer une percée dans le Donbass en direction de Kramatorsk, principale ville encore sous contrôle ukrainien dans la région.

Au-delà de la photo de famille attendue pour symboliser le soutien inébranlable des alliés de l’Ukraine face à la Russie, l’objectif est d’avancer sur les points les plus consensuels du plan de paix défendu par Kiev.

Lors d’une interview accordée à l’AFP en mai, le président Volodymyr Zelensky a mis en exergue « trois points » principaux. Le premier concerne la libre navigation en mer Noire pour assurer la sécurité alimentaire mondiale en permettant les exportations de céréales ukrainiennes. Une thématique chère aux pays dits du Sud.

Le second concerne la sécurité nucléaire et énergétique en Ukraine, alors que les frappes russes ont démoli les infrastructures civiles et que le risque d’un incident nucléaire majeur demeure du fait de l’occupation de la centrale de Zaporijjia.

Le troisième point concerne le retour de quelque 20 000 enfants ukrainiens déportés en Russie, des faits pour lesquels la Cour pénale internationale a émis au printemps 2023 un mandat d’arrêt contre Vladimir Poutine.

Avec Reuters et AFP

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