MOUSSA TOURE INVITE A REPONDRE AUX DEFIS DU FINANCEMENT ET DE LA DIFFUSION

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Portrait de Moussa TOURE - Cinéaste sénégalais© Malick MBOW
Portrait de Moussa TOURE – Cinéaste sénégalais© Malick MBOW

Dans une interview exclusive, Moussa Touré, cinéaste sénégalais de renom, revient sur les défis actuels du secteur et propose des pistes pour redonner au cinéma sénégalais sa gloire passée.

Lamine DIEDHIOU  |   Publication 15/03/2025

Le cinéma sénégalais, autrefois considéré comme l’un des fleurons du 7e art en Afrique, traverse aujourd’hui une période difficile. Dans une interview exclusive, Moussa Touré, cinéaste sénégalais de renom, revient sur les défis actuels du secteur et propose des pistes pour redonner au cinéma sénégalais sa gloire passée.

Le cinéma sénégalais a connu son âge d’or dans les années 1960 et 1970, porté par des figures emblématiques comme Ousmane Sembène, considéré comme le père du cinéma africain. Sembène, avec des œuvres comme La Noire de… (1966) et Xala (1975), a su capturer les réalités sociales et politiques du Sénégal post-colonial, tout en offrant une critique acerbe des systèmes de pouvoir. D’autres réalisateurs comme Djibril Diop Mambéty, avec son film Touki Bouki (1973), ont également marqué l’histoire du cinéma africain par leur audace narrative et esthétique.

Ces films, souvent produits avec des moyens modestes, ont néanmoins réussi à s’imposer sur la scène internationale, remportant des prix dans des festivals prestigieux et ouvrant la voie à une nouvelle génération de cinéastes africains. Cependant, depuis ces années glorieuses, le cinéma sénégalais semble avoir perdu de son éclat, confronté à des défis structurels et financiers.

Selon Moussa Touré, les problèmes actuels du cinéma sénégalais résident en particulier dans le financement. « Nous avons peu d’argent, et les coproductions avec le cinéma français, par exemple, ne profitent pas toujours aux cinéastes sénégalais », explique-t-il. Il déplore que les cinéastes sénégalais ne bénéficient pas des recettes générées par leurs films, malgré leur participation financière. « Nous gagnons de faire un film, mais nous ne gagnons pas de recettes », souligne-t-il.

La diffusion des films sénégalais est un autre problème majeur. Moussa Touré constate que les salles de cinéma traditionnelles sont quasi inexistantes, et que les films africains peinent à trouver un public. « Les gens ne vont pas voir des films africains », regrette-t-il. Il souligne l’importance de créer des salles de cinéma dédiées aux productions locales, afin que les films sénégalais puissent être accessibles au grand public.

REDYNAMISER LE CINEMA SENEGALAIS : LES PROPOSITIONS DE MOUSSA TOURE

Pour Moussa Touré, la solution passe par une réforme en profondeur du secteur. Il propose l’organisation d’assises nationales du cinéma, réunissant à la fois les anciennes et les jeunes générations de cinéastes. « Le cinéma n’est pas juste pour les vieux ou pour les jeunes, c’est pour tout le monde », insiste-til. Selon lui, il est essentiel de créer un dialogue intergénérationnel pour redonner au cinéma sénégalais sa vitalité.

Touré plaide également pour une plus grande implication des cinéastes dans les instances décisionnelles, comme le Fonds de Promotion de l’Industrie Cinématographique et Audiovisuelle (FOPICA). « Le FOPICA n’a jamais voulu impliquer les cinéastes », déplore-t-il. Il estime que les cinéastes, en tant que professionnels du secteur, devraient être au cœur des décisions concernant la production et la distribution des films.

Enfin, Moussa Touré suggère la création d’un centre cinématographique qui permettrait aux cinéastes d’avoir accès à des ressources techniques et financières pour réaliser leurs projets. « Un centre cinématographique permettrait d’avoir un minimum d’argent pour faire un film », explique-t-il. Il insiste sur le fait que ce centre doit être géré par des cinéastes, et non par des administrateurs qui ne comprennent pas les réalités du métier. Moussa Touré reste optimiste quant à l’avenir du cinéma sénégalais, mais il estime que des changements structurels sont nécessaires pour retrouver le succès des années passées. « Il faut se mettre ensemble, tous se mettre ensemble », conclut-il. Pour lui, le cinéma sénégalais a encore beaucoup à offrir, à condition que les acteurs du secteur travaillent main dans la main pour surmonter les défis actuels.

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